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Full text of "Teodoro Vilardebo 1830 Essai Sur Les Moyens"

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ESSAI 


N». 78. 

SUR LES MOYENS QUE LA CHIRURGIE OPPOSE / 

// 

AUX HÉMORRHAGIES ARTÉRIELLES 
TRAUMATIQUES PRIMITIVES , 

Thèse présentée et soutenue à la Faculté de Médecine de Paris, 
le 19 avril i83o , pour obtenir le grade de Docteur en 
médecine ; 

J t 

Par Théodore-Michel-Simon VILARDEBÜ , de Montevideo . 

Amérique du Sud. 

Un sentiment naturel attache à l'idée de perdre son sang une terreur machinale , 
dont l'enfant qui commence à parler et l’homme le plus décidé sont également 
susceptibles. On ne peut point dire que cette peur soit chimérique. Si l'on comp- 
tait ceux qui perdent la vie dans une bataille , on verrait que les trois quarts ont 
péri par quelque hémorrhagie; et, dans les grandes opérations de chirurgie, cet 
accident est presque toujours le plus formidable. 

Mohand , Mémoires de l’Académie de chirurgie. 

A PARIS, 

DE L'IMPRIMERIE DE DIDOT LE JEUNE, 

Imprimeur de la Faculté de Médecine , rue des Maçons-Sorbonne, n*. i5. 

1 83 o. 


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FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS 


Professeur s. 

M. L ANDRÉ-BEAU VAIS, Doyir. Messieurs. 


Anatomie. 

Physiologie. 

Chimie médicale ^ . 

Physique médicale. 

Histoire naturelle médicale 

Pharmacologie.. . • 

Hygiène. 

Pathologie chirurgicale » 

Pathologie médicale.. 

Opérations et appareils. 

Thérapeutique et matière médicale. 

Médecine légale 

Accouchemens, maladies des femmes en couches et 
des eni'ans nouveau-nés * 


Clinique médicale, 


Clinique chirurgicale. 


CRUVEILHIER, Examinateur. 
DUMÉIUL. 

ORFILA. 

PELLETAN. 

CLARION. 

GUILBERT. 

ANDRAL, Suppliant. 

{ MARJOL 1 N. 

ROUX. 

I F 1 ZEAÜ. 

( FOUQUIER. 

RI CHER AND, Président. 
AEIBERT. 

ADELON. 

i 

DESORMEAUX. 

Î CAYOL. 

C HOMEL, Examinateur . 

L ANDRÉ-BEAUVAIS. 
RECAMIER. 

Î BOUGON. 

BOYER. 

DUBOIS. 

DÜPUYTREN. 


Clinique d’accouchemens. DENEUX, Examinateur. 

Professeurs honoraires. 

MM. DE JUSSIEU, DES GENETTES, DEYEUX, L ALLUMENT? LEHOl X. 
Agrégés en exercice. 


Mbcsiburs 


Messieurs. 


Baudklocqub. 

Dublbd. 

Baylk. 

Düeois. 

Hkbard. 

Gkruy. 

Blà.tdir. . 

Gibecrt. 

Bocillaud. 

Hatin. 

Bouvier, Examinateur. 

Lisfbanc. 

Bhiquet, Examinateur. 

Martin Solor. 

Bhorc.niabt. 

PlORBY. 

C loquet. 

Rochoox. 

CoTTERBAU. 

Sardbas. 

Dance, Suppléant. 

Trousseau. 

DhVKBCIF. 

V BI.FE AU. 


Par délibération du 9 décembre 1708, l'Ërole a arrêté que les opinions émises dans les 
dissertations qui lui seront présentées doivent être considéré» * comme propres à leurs auteurs, 
qu’elle n’entend leur donner aucune approbation ni improbation. 


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! 


VIRO INTEGERRIMO 

DB CIVIBUS MONTEVIDEANIS QU AM MAXIME MERITO , 
EXIMIIS Y1RTUTIBUS 
COMMENDATISSIMO , 

GRAVISSIMO ATQUE AMANTISS1MO 

A 

GENITORI MEO, 


Michaeli-Antonio YILARDEBO , 

LUSITANjE CHKISTI IiSGIONIS equiti. 


IN ÆTERNUM PIETATIS MONUMENTUM 
GRATITUDINISQUE PIGNÜS. 


HUHIUIUIIS AC OBSEQUENTISSIMU8 FIUDS , 

T.-M.-S. YILARDEBO. 


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AMPL1SSJM0 ATQUE ORNATISSIMO* 

ART! S VIRO, 

NATURÆ SCRUTATORI 
SAGACISSIMO , 

AT QUE IN D1VKRSIS MEDIC1NÆ OPERATORIÆ PARTIBUS 
ILLUSTRAND1S , AUGENDIS, EXERCENDIS 
DEXTERR1MO AC SOLERTISSIMO , 

Joanni-Zulima A MU SS AT , 

SALUBERRIMÆ FACULTATI8 PAR18IORUM 
DOCTORI CHIRURGO , 

IRCUTjE ACADEMIÆ MEDICINÆ 
QÜÆ SUB AU8PICIIS 

OPT1MI AC POTENTISSIMI GALLORUM REGIS 
FLORET 

UEUBRO MERITI8SIMO , 

ALIARUMQUE SOCIETATÜM UEDICARUM 
COLLEGUE CLARISSIMO , 

NEC NON 

REI ANATOMICÆ ET CHIRURGICÆ 
PROFESSORL ERUDITI8SIMO , 

MÆCENATI MEO. 

IN PUBLICUB1 PERPETLUMQUE 
REVERENTIÆ ET GRATI ANIMI 
TESTIM ONIUM. 

T.-M.-S. V1LARDEBO. 


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AVANT-PROPOS. 



La chirurgie fut, jusqu’à la fin du seizième siècle, arrêtée 
dans son essor par la crainte des hémorrhagies. Frappée 
d’effroi à la seule idée de ces effusions sanguines , souvent 
si abondantes , si rebelles , si promptement funestes , elle 
avait ordinairement recours , pour les éviter, aux procédés 
les plus lents ou même les plus barbares. Les caustiques , 
le feu, les ligatures, servaient à détruire la plupart des 
tumeurs ou des productions organiques anormales sur les- 
quelles nous portons aujourd’hui avec sécurité l’instrument 
tranchant. Tout ce qui ne pouvait être attaqué par ces 
moyens était abandonné à des progrès dont la mort des su- 
jets devenait en beaucoup de cas le terme inévitable ; l’art 
présentait la singulière et déplorable alliance d’une cruauté 
quelquefois barbare et d’une timidité souvent funeste. 

L’introduction des ligatures immédiates , appliquées aux 
orifices des artères- divisées durant les blessures ou les opé- 
rations , changea rapidement la face de la chirurgie. Cette 
méthode hémostatique , fécondée et perfectionnée par la 
découverte du mécanisme et des lois de la circulation, fut 
l’origine de presque tous les perfectionnemens , du plus 
grand nombre des conquêtes *qui depuis trois cents ans ont 
élevé la partie chirurgicale de la médecine au premier rang 
parmi les arts utiles. . 


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YH) 

Dans l’état actuel de la science , l’ensemble des moyens 
hémostatiques opposés par la chirurgie aux hémorrhagies 
artérielles traumatiques primitives constitue l’une des bran- 
ches les plus importantes de son domaine. Une foule de tra- 
vaux ont été exécutés sur les diverses parties de ce sujet ; et 
si , jusqu’à ces dernières années , l’art laissait , dans certaines 
circonstances , quelque chose à désirer sous le rapport de la 
simplicité des procédés et de la sûreté des résultats , on peut 
espérer qu’enrichi d’une méthode nouvelle , on verra dimi- 
nuer encore le nombre déjà restreint des cas où son impuis- 
sance affligeait l’humanité. La torsion des artères est venue , 
non remplacer peut-être la ligature, mais offrir des res- 
sources précieuses pour les cas où ce moyen est inapplicable. 
Je me propose , dans ce travail , d’exposer les phénomènes 
des hémorrhagies artérielles primitives , puis de décrire les 
procédés principaux que la chirurgie emploie pour les ar- 
rêter , et enfin de comparer entr’eux ces moyens hémosta- 
tiques , et de faire ressortir les avantages et les inconvéniens 
qui les distinguent. Je traite ainsi d’une des parties les plus 
précieuses de l’art de guérir : heureux si mes efforts ne sont 
pas restés trop au-dessous de mon sujet, et sont accueillis 
avec indulgence par mes juges ! ' 




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ESSAI 


SUR LES MOYENS QUE LA CHIRURGIE OPPOSE 

AUX HÉMORRAGIES ARTÉRIELLES 

TRAUMATIQUES PRIMITIVES. 


PREMIÈRE PARTIE. 


Des moyens que la nature emploie pour suspendre ou arrêter les 
hémorrhagies traumatiques artérielles. 

L<E8 circonstances qui favorisent la suspension ou l’arrêt des effusions 
sauguines, à la suite des blessures des artères, dépendent soit de la dis- 
position des parties solides à travers lesquelles l’hémorrhagie a lieu , 
soit des qualités du sang qui s’écoule, soit, enfin, de l’énergie va- 
riable des contractions du cœur. 
u 


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. { >0 ) 

i*. Relativement aux dispositions des parties et des vaisseaux qui four- 
nissent le sang , il convient de distinguer les phénomènes qui se ma- 
nifestent lorsque les artères sont complètement et transversalement 
divisées de ceux qu’on observe dans le cas de simple piqûre ou de 
section imparfaite de ces canaux. Occupons-nous d’abord des pre- 
miers. 

Phénomènes qui surviennent à la suite des sections transversales et com- 
plètes des artères. Les amputations fournissent la meilleure occasion 
qu’il soit possible de choisir pour bien étudier dans ces Cas le méca- 
nisme du # travail hémostatique auquel se livre la nature. Aussitôt 
qu’une partie considérable, telle qu’un membre, par exemple, a été 
séparée du reste du corps, le phénomène le plus saillant qui semani- • 
feste est la sortie précipitée d’un sang rutilant à travers les vaisseaux 
divisés : ce liquide jaillit de presque tous les points de la surface de la 
plaie en flots saccadés , proportionnés en volume au calibre des artères 
et isochrones aux contractions du cœur. Après quelques instans, cet 
écoulement se ralentit ; les plus petits vaisseaux d’abord , puis les 
plus volumineux cessent de lancer des jets : le sang coule en bavant 
le long des chairs et s’arrête enfin , tantôt d’une manière définitive , 
tantôt pour reparaître de nouveau, lorsque la faiblesse du sujet sera 
dissipée. 

Aussitôt que chaque vaisseau est divisé par l’instrument tranchant, 
sa tunique moyenne , à raison de son élasticité , sc rétracte jusqu’à une 
hauteur variable dans la gaine celluleuse qui l’enveloppe , et entraîne 
dans ce mouvement la membrane interne qui lui est adhérente. N’é- 
tant plus soutenue par les deux autres tuniques , la membrane cellu- 
leuse, malgré les connexions qui l’unissent aux tissus environnans, 
revient un peu sur elle-même ; elle forme au-devantde l’artère coupée 
un petit cône plus ou moins allongé , dont Ut surface interne est inégale 
et rugueuse, et dont la base correspond à l’extrémité rétractée de la 
tuoique moyenne, tandis que son sommet fait partie de la surface de 
la plaie. Le sang alors s’engage dans ses cellules , s’y dépose , s’y coa- 


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( » ) 

gule en partie , augmente son épaisseur et diminue son calibre. L’ép 
coulement hémorrhagique se trouve dès-lors- de plus en plus gêné ; 
le liquide ralentit sa marche , et du coagulum se dépose dans ta ca- 
• vité qu-’il parcourt jusqu ’àce qu’elle en soit entièrement obstruée. 

Ce caillot a presque toujours une base arrondie et sphéroïde, 
qui forme au devant du vaisseau un renflement plus ou moins 
considérable :■ vers l’intérieur, il se prolonge dans la gaine cellu- 
leuse qui le revêt , le soutient et à laquelle ii adhère. Au dehors , 
les dernièiies gçuttes de liquide qu’il a laissé échapper , coagulées à 
sa partie inférieure, le recourbent légèrement eo forme de crosse : 
cette cpurbure peut dépendre aussi de la force inégale des adhérences 
de l’artère aux tissus voisins et de l’impulsion du sang, qui, trouvant 
dans, la caillot un obstacle à son écoulement, tend à courber les tuni- 
ques des vaisseaux dans le sens où leurs connexions sont les plus 
fortes ; mais, le plus ordinairement , cet effet est le résultat de la 
fbrmatiou d’une sorte de stalactite à la partie la plus externe du coa- 
gulum. 

Lorsqu’une artère est divisée, non à la surface d’une plaie d’ampu- 
tation, mais par une section plus ou moins large faite à un membre 
laissé intact dans le reste de son épaisseur , les phénomènes indiqués 
plus haut sont légèrement modifiés : les tuniques internes du tube 
artériel se rétractent encore alors dans la gaine celluleuse ; le sang s’é- 
chappe.au dehors par la plaie faite à cellc-ci, ou s’infiltre dans le tissu 
cellulaire environnant, selon que le canal de la- plaie est plus ou moins 
large ou étroit, direct ou sinueux, etc. En se retirant, la membrane 
moyenne de l’artère laisse à nu la surface interne de la gaine cellu- 
leuse, dans les mailles de laquelle le sang s’infiltre, se dépose et se 
coagule : l’ecchymose gagne même le tissu cellulaire voisin de l’ar- 
tère; le calibre de la gaine se trouve diminué d’autant, et, en parcou- 
rant. lé canal de plus en plüs étroit quelle olfre au sang , celui-ci , 
dont la force d’impulsion diminue par gradation, dépose sur ses pa- 
rQU. uq caillot qui huit par l’obstruer. Le bout de l’artère est alors 
entouré et recouvert d’un coagulum sanguin , en partie infiltré , en 


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( la ) 

partie déposé dans la cavité de la gaine , et qui figure assez bien b 
coiffe de cire dont on garnit le goulot des bouteilles. 

Ce mécanisme de la suspension naturelle des hémorrhagies a été 
décrit avec une grande exactitude par J.-L. Petit ( 1 ) , et démontré 
plus tard par les expériences importantes autant que curieuses de 
Jones (2) et de Bèclard (3). En répétant récemment les observa- 
tions de ces derniers expérimentateurs , en les variant, et surtout en 
examinant ce qui a lieu à la suite des amputations , M. Amassât a 
été conduit à émettre sur ce point de doctrine quelques idées nou- 
velles. 

Selon ce chirurgien ingénieux , la portion du coagulum qui est 
infiltrée dans le tissu cellulaire de la gaine artérielle et aux environs 
des bords de la plaie ne contribue pas d’une manière appréciable à 
la cessation de l’hémorrhagie. Cette ecchymose est un phénomène 
purement accidentel; sa mollesse , due à la fluidité du sang qui la 
forme, contraste singulièrement avec la résistence et la solidité du cail- 
lot déposé dans la cavité de la membrane celluleuse; ce dernier peut 
seul résister à l’impulsion du sang , indépendamment de l’état de li- 
berté ou d’infiltration des parties environnantes : celles-ci, en effet, 
sont dépourvues d’ecchymose à la suite des amputations, et l’hémor- 
rhagie n’en est pas moins solidement arrêtée. 

Ces réflexions et ces rapprochemens sont d’un grand poids. Il se 
peut que Jones et Bèclard aient attribué trop d’influence à la pré- 
sence du sang déposé dans les mailles celluleuses de la gaine des vais- 
seaux et dans le tissu cellulaire environnant; cependant, on ne sau- 
rait considérer ce dépôt comme entièrement inutile : l’infiltration 
celluleuse diminue manifestement la largeur des voies par lesquelles 


( 1 ) Uémoires de l'académie des sciences , 1 735 , et Œuvres posthumes , t. 3 . 

(2) O11 the process employed by nature , in suppression tbe hemorrhage from 
divided and puuctured arteries. London, 1810. 

( 3 ) Expériences sur les blessures des artères, — Mémoires de la société médicale 
d’émulation, t. 8. Paris, 1817. 


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( »3 ) 

l’hémorrhagie s’opère , et contribue à ralentir la sortie du liquide 3 
en s’unissant avec le coagulum déposé, le sang qui la forme attache 
en quelque sorte ce. dernier aux tissus , augmente sa- résistance et, 
par suite, le rend plus apte à s’opposer à l’impulsion du. cœur. Il est 
superflu, sans doute, que l'infiltration s’étende au-delà de la gaine et 
du tissu cellulaire immédiatement contigu à sa surface externe; mais, 
bornée à ces limites, son influence favorable ne saurait être révoquée 
en doute. 

Il n’est pas difficile d’expliquer pourquoi l’hémorrhagie est ordi- 
nairement arrêtée un peu de temps et d’une manière définitive dans 
les plaies par arrachement , ou même dans celles qui, produites par 
des armes tranchantes, surprennent les membres dans un état violent 
d’extension ; par exemple , lorsqu’un coup de sabre est porté vers 
l’aisselle , le bras étant fortement relevé. Dans ces diverses circons- 
tances , l’artère étant divisée ou rompue à l’instant où ses tuniques 
sont tiraillées, la rétraction des membranes interne et moyenne dans 
la tunique et la gaine celluleuses est considérable , ce qui donne 
lieu à un caillot plus long et mieux soutenu par ces enveloppes. Le 
même effet a lieu dans les plaies faites par lès armes à feu, puisque 
les corps orbes que la poudre à canon met en mouvement ne divisent 
les tissus qu’en les brisant, et après les avoir- étend us autant que le 
permet leur structure. 

Quoi qu’il en soit, le caillot qiii constitue le premier et le principal 
obstacle que la nature oppose aux hémorrhagies traumatiques arté- 
rielles, présente constamment un volume proportionné au calibre du 
vaisseau dont il ferme l’extrémité. Sa couleur est d’un rouge vif dans 
les ramifications vasculaires les plus ténues ; il devient d’un rouge plus 
foncé et comme brunâtre aux orifices des gros troncs. En le lavant 
avec une éponge imprégnée d’eau , il abandonne une partie de sa ma- 
tière colorante , et se réduit à une base fibrineuse d’un rouge pâle. 

La théorie qui fonde sur la présence des caillots déposés aux ori- 
fices des vaisseaux la suspension et l’arrêt des hémorrhagies a été 
attaquée dans ces derniers temps par quelques personnes plus par- 


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( «4 ) • 

tées à imaginer des hypothèses spéculatives qu’à observe* les faits et 
à interroger la nature au moyen des expériences; 

« Le mouvement principal de ta circulation, dit, par exemple, 
M. Koch fils, de Munich, ne peut exister que dans le sang vivant, et 
non dans les vaisseaux , qui ne sont que fort peu essentiels et seule- 
ment accessoires. Nous n’ignorons pas que le sang peut se choisir lui- 
même la route qu’il doit parcourir , et que l’influence du cœur a 
beaucoup moins d’action sur son cours qu’on ne le croyait jadis. Il 
n’y a donc rien d’étonnant que , par une force et une action particu- 
lières, il puisse éviter de s’écouler par l’orifice béant d'un vaisseau. De 
plus, on ne peut nier que le sang ne soit attiré jusqu’à un certain de- 
gré dans quelques parties du corps ; et il est permis de penser qu’a- 
près avoir détruit les rapports et la force d’attraction des organes, en 
coupant les vaisseaux , le sang cesse de circuler dans ces derniers(i). » 

Ce qui étonne le plus en lisant ce passage , est la singularité du rôle 
que l’auteur y fait jouer au sang , et l’étrange amalgamé qu’on y ren- 
contre entre quelques remarques vraies et/les conclusions erronées 
qui en sont déduites. La même absence de notions anatomico physio- 
logiques positives et exactes se fait remarquer dans les explications de 
M. Nathan Smith, de Yale. Ce chirurgien prétend, en effet, que les 
vaisseaux capillaires sanguins étant doués d’une force attractive , en 
vertu de laquelle ils provoquent le mouvement du sang dans les 
troncs volumineux, il devient facile de comprendre pourquoi une ar- 
tère coupée à moitié continue à donner du sang, tandis que l’hémor- 
rhagie s’arrête lorsque sa section est complète. Il croit trouver pa- 
reillement dans cette attraction des capillaires la raison pour laquelle, 
lorsqu’une artère est coupée précisément au-dessous de la naissance 
d’une branche considérable, ou sur le point d’une bifurcation, elle 


(i) Remarques sur l’amputation et l’omissîdit de la ligature des vaisseaux. 
— Journal des progrès des sciences et institutions médicales en Europe, en Amé- 
rique , etc. , t. 3 , p. 136. , . 


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( i5 ) • 

fournit du sang avec autant d’opiniâtreté que si elle n’était que par- 
tiellement entamée (i). 

Les faits invoqués par l’auteur, c’est-à*dire l’influence des capil- 
laires et la persistance ou la cessation des hémorrhagies dans les cir- 
constances qu’il indique sont parfaitement exacts; seulement il les a 
rapprochés sans motif, et a établi entr’eux des rapports de Causalité 
que repoiiSBe la nature. Il semble que certains esprits aient le don na- 
turel de faire sortir l’erreur et l’obscurité du sein même 1 de la vérité 
et de la lumière. 

Des observations que la pratique de la chirurgie permet de réitérer 
journellement, ou qu’on peut faire à t’aide des expériences les plus 
simples, démontrent surabondamment l’exactitude dé la théorie de 
J.-L. Petit. Si, par exemple , lorsqu’un caillot est formé àTextrémité 
d’une artère, on en détache, à dessein ou par accident une petite 
partie, un jet de «aug très-délié parait aussitôt. Si la moitié du bou- 
chon est enlevée , la colonne de liquide aura un volume de moitié 
moindre que le calibre de l’ouverture qu’il oblitérait. Enfin; si la dés- 
obstruction est complète, ou si l'on coupe l’artère immédiatement au- 
dessus des limites supérieures du coagulum, le sang sortira immédia- 
tement a plein canal. J’ai Vu répéter plusieurs fois ceS expériences 
par M. A muant. Si les idées de MM. Koch et Nathan Smith étaient fon- 
dées , on ne concevrait ni ces apparitions nouvelles d’hémorrhagies 
arrêtées, suivant eux, par la volonté du sang ou par la cessation de 
l’influence attractive des capillaires, et Surtout l'invasion si dangereuse 
des hémorrhagies consécutives , lors de la chûte prématurée des liga- 
tures placées sur les artères. 

Mais le coagulum formé & l’extrémité d’pne artère transversalement 
divisée, et qui contribue si puissamentà arrêter l’hémorrhagie, n’a pas 
d’abord une assez grande solidité pour résister sûrement à l’impulsion 
du sang, lorsque la circulation reprendra de l’énergie, lisubit, avant 


(i) Remarques sur la suppression spontanée de l’hémorrhagie dans les cas 
de section et de plaies des artères. — Journal des progrès , etc. , t. g, p. 1 18. 


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( *6 ) 

de constituer un obstacle définitif à l’écoulement du liquide et de servir 
d’intermédiaire à l’oblitération des vaisseaux , une série de change- 
mens que nous allons rapidement énumérer, leur étude approfondie 
ne se rattachant que d’une manière éloignée à l’objet de ce travail. 

Lorsque l’extrémité béante d’une artère est obstruée , ainsi que 
nous l’avons expliqué, par un dépôt de coagulura, derrière ce pre- 
mier obstacle, et jusqu’à la naissance de la branche collatérale immé- 
diatement supérieure , le sang s’arrête dans le cul-de-sac que lui pré- 
sente le vaisseau. Il dépose dès-lors de nouvelles couches de fibrine 
au-dessus de celles qui forment le premier caillot; celui-ci s’allonge 
par conséquent de plus en plus dans le canal de l’artère , et acquiert 
une forme conoïde dont la grosse extrémité correspond à la surface 
de la plaie, tandis que la petite remonte successivement jusqu’à la 
naissance de la première collatérale. J.-L. Petit comparait ce caillot à 
un, clou dont la tête serait à l’orifice de l’artère coupée, et la pointe à 
une distance variable dans le canal du vaisseau. Cette pointe est tou- 
jours mince , aiguë , flottante dans le sang maintenu liquide autour 
d’elle ; la base , au contraire , a contracté dès les premiers inslansavec 
la tunique celluleuse des adhérences qui deviennent ensuite plus in- 
times , en mênje temps qu’elles s’étendent dans la cavité de l’artère. 
Les parois de celle-ci reviennent en effet sur elles-mêmes; la partie 
séreuse , puis la matière colorante du caillot sont absorbées. Réduit à 
sa fibrine, et de plus en plus intimement uni à la surface interne de 
l’artère , il acquiert une solidité considérable , se confond enfin avec 
les parois artérielles , et contribue à leur transformation en un cordon 
plein , résistant, fibreux, qui disparaît enfin lui-même et se confond 
avec le tissu cellulaire ambiant. L’artère blessée ne continue d’être 
perméable que jusqu’à la collatérale la plus rapprochée de la section. 
Cette branche se dilate et devient la continuation véritable du tronc, 
oblitéré ou même complètement effacé au-dessous d'elle. 

Les mêmes changemens ont lieu alors, soit qu’il s’agisse d’une am- 
putation , soit que l’artère ait été divisée dans la longueur d'un 
meqibre. Ici seulement, la circulation devant se continuer dans la 


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( >7 ) 

partie située au-dessous de la blessure , les branches collatérales , nées 
du bout supérieur, se dilatent davantage et font passer, à l’aide de 
leurs anastomoses, une quantité suffisante de sang dans les ramifica- 
tions ascendantes des branches fournies par le bout inférieur, et par 
suite dans celui-ci. Il s'établit alors, à côté du grand courant sanguin 
détroit parla blessure, un courant supplémentaire plus ou moins 
large, plus ou moins divisé , plus ou moins suffisant pour entretenir 
la nutrition normale des parties; quelquefois, la circulation se rétablit 
par des voies tout à fait nouvelles, par des artères créées de toutes 
pièces à la suite de la blessure. Ce fait , soupçonné par J. Hunter, 
entrevu par M. Maunoir et par Joncs , a été spécialement constaté sur 
la carotide des animaux, et mis hors de doute par MM. Zuber , Parry, 
Ébel, Seiler, Mayer , Salemi, Focrster, et tout récemment encore par 
M. Schœnsberg de Danemarck (i). 

Sans contester la réalité des faits décrits par ces observateurs esti- 
mables , il est cependant permis d’attendre , avant de les adopter, que 
leurs résultats aient reçu la sanction d’un plus grand nombre d’ex- 
périences. 

Phénomènes qui se manifestent lorsque les artères sont incomplètement 
divisées. Il est remarquable que les hémorrhagies sont , en général , 
plus difficilement arrêtées dans ces cas que dans ceux qui résultent de 
l’entière division du tube artériel. 

Il importe de faire observer d’abord que toutes les circonstances 
relatives à la blessure étant d’ailleurs semblables, les piqûres ou les 
sections imparfaites des artères occasioncnt des hémorrhagies d’autant 
plus abondantes que moins de parties existent au-devant de ces vais- 
seaux , et qu’ils sont plus complètement dépouillés de leur gaine 
celluleuse. 

Si une simple piqûre est faite à un tube artériel , ses membranes 


(i) Mémoire sur le rétablissement de la circulation après la ligature et la sec- 
tion des troncs artériels. — Journal des progrès, etc. , t »», p. 70. 

3 


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(im- 
propres , .qui sont résistantes», . seront plus largement' divisées que la 
gaine Gelluleuse, dont la texture .est molle et extensible» Dès-lors, lesang 
qui s’échappe du vaisseau trouve de l’obstacle à franchir l’ouverture de 
cette gaine , la soulève , la distend , s’y coagule, et y forme une ecchyt- 
mose d’une étendue variable, mais qui se plonge souvent» à plusieurs 
pouces au-dessus et au-dessous de la blessure. Les deux ouvertures de 
la gaine et des membranes propres de l’artère cessent fréquemment 
alors d’être parallèles , et cette circonstance vient ajouter à la. difficulté 
avec laquelle le sang s’échappe , soit au dehors , soit en s’infiltrant 
dans les tissus voisins. Si la gaine n’existe plus , on conçoit que cet 
écoulement ou cette infiltration seront plus faciles et plus considé- 
rables. Dans les cas ordinaires, le coagulum qui se forme se compose 
de deux parties , dont l’une extérieure, large, appuyée contre la gaine 
soulevée des vaisseaux , constitue ce que J.-L. Petit nommait le cou- 
vercle , parce qu’elle recouvre effectivement la plaie qui donnait issue 
au sang; tandis que l’autre, arrêtée entre les lèvres de cette plaie, 
contracte avec elles des adhérences plus ou moins intimes , et forme 
le bouchon, selon le langage du grand praticien dont le génie prépara 
la brillante époque de l’Académie royale de chirurgie. 

Les incisions longitudinales qui ne dépassent pas une ligne d’éten- 
due, et les incisions transversales ou obliques, bornées à moins du 
quart de la circonférence des artères , se comportent â- peu près 
comme les simples piqûres. Le sang qu’elles fournissent est seulement 
plus abondant , plus difficile à s’arrêter. Les caillots qui les oblitèrent 
sont moins solidement soutenus par la membrane celluleuse et la gaine 
plus largement ouverte; mais ces caillots peuvent encore se borner à 
n’occuper que les lèvres des solutions de continuité, et laisser libre 
le canal du vaisseau partiellement entamé. 

Ces cas toutefois sont les plus rares. Dans les circonstances ordi- 
naires, les divisions artérielles incomplètes comprenant, en travers ou 
dans des directions obliques, le quart, la moitié ou les deux tiers de 
la circonférence des vaisseaux, les dispositions les plus défavorables 
semblent se réunir pour s’opposer à la cessation temporaire ou défi- 

I 


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( >9 ) 

nitive de l'hémorrhagie. Cette rétraction de la tunique moyenne de 
l'artère qui, dans les sections complètes, fait remonter le bout supé- 
rieur et le cache dans la tunique celluleuse , ne fait ici que provoquer 
l’écartement des lèvres de la plaie ; celle-ci , maintenue béante , four- 
nit du sang avec d’autant plus d’abondauce , que la tunique cellu- 
leuse , incisée dans la même proportion , ne présente aucun obstacle 
à son écoulement : aussi les hémorrhagies de ce genre sont-elles de 
toutes les plus dangereuses ; et , selon la remarque de Béclard , lors- 
qu’elles éprouvent quelque interruption , les caillots qui se forment 
ne tardent pas à céder aussitôt que la circulation reprend de l'énergie. 
Ces renouvellemens de l’effusion sanguine se continuent fréquem- 
ment, jusqu’à l’entier épuisement des forces du sujet et la cessation 
de la vie. 

Le coagulum formé dans les cas de piqûre , de division longitudi- 
nale peu étendue, ou de sections transversales ou obliques, moindres 
que le quart de la circonférence des artères , éprouve , après avoir 
provisoirement suspendu l’hémorrhagie , des transformations secon- 
daires dont il importe d’étudier attentivement la succession. La por- 
tion extérieure, ou le couvercle, est d’abord absorbée; il n'en reste 
bientôt plus que les élémens fibrineux r qui, combinés avec les lames 
cellulaires de la gaine, les unissent, les solidifient, pour ainsi dire, 
et les appliquent contre l’ouverture faite aux tuniques moyenne et 
interne. L’artère présente sur ce point, à l’extérieur, une nodosité 
plus ou moins élevée et résistante. La portion du caillot placée entre 
les lèvres mêmes de la solution de continuité des membranes propres 
à l’artère , perd également sa matière séreuse, ainsi que ses molécules 
colorantes ; réduit à ses élémens fibrineux, il contracte avec les bords de 
la plaie des adhérences de plus en plus intimes , et se convertit en un 
tissu jpunàtre , d’épaisseur et de densité variables , qui constitue une 
véritable cicatrice, derrière laquelle le calibre du vaisseau reste libre. 

Cette cicatrice, d’autant plus solide qu’elle est moins étendue, 
remplace, dans le lieu de la blessure, les membranes normales de 
l’artère ; mais , excepté les cas de piqûre simple faite par des ai- 


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( 20 ) 

guilles ou d'autres corps analogues , il est rare que chez l'homme elle 
offre au sang une résistance égale à celle du reste des parois du vais- 
seau. Presque toujours son tissu , à chaque instant frappé par le sang, 
se laisse graduellement soulever, puis distendre, et permet à un ané- 
vrysme traumatique circonscrit ou consécutif de se former. Si cette 
cicatrice est très-faible, ou si, soumise à des causes subites ou violentes 
d'extension , elle se déchire, un épanchement sanguin a lieu dans les 
tissus voisins, et un anévrysme diffus ou par épanchement se déve- 
loppe à une époque où les progrès de la guérison semblaient devoir 
mettre à l'abri de tout accident nouveau. Il est à remarquer que ces 
accidcns plus ou moinséloignés, des divisions incomplètes des artères, 
n’ont presque jamais lieu qu'après plusieurs semaines ou plusieurs mois 
depuis la blessure. Aussi long-temps que le couvercle ou la portion ex- 
térieure du caillot soutient le bouchon , celui-ci trouve un point d'appui 
contre la tunique celluleuse et résiste : il ne cède facilement, au con- 
traire, que lorsque les dernières portions de la fibrine épanchée aux 
environs du vaisseau étant résorbées, il se trouve isolé et abandonné 
à sa faible épaisseur et à sa fragilité. 

Dans ies cas les plus graves , lorsque la moitié oa plus de la circon- 
férence des artères est divisée, les caillots qui se forment pénètrent dans 
la cavité du vaisseau, l'obstruent et y gênent le coursdu sang. 11 est dif- 
ficile, ou plutôt il est impossible de déterminer rigoureusement Té- 
tendue d’incision qui rend inévitable l'oblitération des vaisseaux qui 
en sont le siège; mais si l'on considère que les caillots ont presque 
constamment alors besoin d'être soutenus par des compressions 
étrangères, et que les agens de celles-ci ont pour effet de les refouler 
dans l'intérieur du canal artériel, ou concevraque, dans la plupart des 
cas, la cessation définitive de l’hémorrhagie ne peut avoir lieu que par 
l'oblitération entière de ce canal. La nature procède dès-lors de la 
même manière qu'après la section complète des vaisseaux; et les dé- 
tails dans lesquels je suis entré plus haut à ce sujet doivent me dis- 
penser d'y revenir ici. 


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{ 21 ) 

: a\ Influence des qualités du sang sur la cessation spontanée des hé- 
morrhagies. Les chirurgiens et les expérimentateurs s’accordent sur 
ce point, que les effusions sanguines artérielles, provenant de vaisseaux 
d’égal volume, ne s’arrêtent pas avec une semblable facilité dans les 
animaux d’espèce différente, et chez les différons sujets. On sait que le 
sang plastique des chiens est tellement concrcscible, qu’il forme aisé- 
ment aux extrémités des artères crurales, axillaires, et même des caroti- 
des, des caillots assez densespour résister à l’effort de la circulation dans 
ces vaisseaux, dont la section est si rapidement mortelle chez l'homme. 
Dans les phénomènes consécutifs de la solidification du coagulum et 
de l’oblitération ou de la cicatrisation latérale des artères , ces effets 
de la plasticité du sang se font encore sentir. A égalité de longueur 
des caillots formés aux extrémités des artères, ou d’étendue des bou- 
chons disposés sur leurs ouvertures incomplètes, les hémorrhagies 
consécutives sont d’autant plus rares, et les obstacles disposés contre 
elles par la nature d’autant plus promptement et plus fortement orga- 
nisés que le sang est plus épais, plus abondant en fibrine et plus concres- 
cible. Quel chirurgien n’a remarqué, dans la pratique, les différences 
considérables qui existent, sous ce rapport, entre les divers individus? 
Chez l’homme robuste et bien nourri, dont le sang est riche et plas- 
tique , les caillots se forment avec facilité et les hémorrhagies s’ar- 
rêtent promptement; tandis quelles se prolongent ou se montrent, 
rebelles à la plupart des moyens qu’on leur oppose , ou se renouvel- 
lent sous l’influence des causes les plus faibles, lorsque la nutrition a 
langui pendant long-temps, et que les matériaux réparateurs des 
pertes organiques n’ont pu être assimilés en quantité suffisante. Les 
sujets sanguins présentent , sous ce rapport , d’incontestables avan- 
tages sur ceux dont la constitution est lymphatique ou nerveuse. 

De même que les lempéramens , certaines maladies , telles que le 
scorbut et les scrophules , influent également sur les qualitésplastiques 
du sang, et sur la facilité avec laquelle se forment les dépôts fibri- 
neux susceptibles de fermer les ouvertures des vaisseaux et de faire 
cesser les hémorrhagies- 


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( ** ) 

Ces remarque sont importantes à se rappeler dans la pratique; 
elles permettent de fixer à l’avance les cas où il faudra» à ta suite des 
opération», oblitérer par 1? ligature jusqu’aux plus petits vaisseaux, 
ceux où l’on pourra confier è la nature le soin d’arrêter les effusions 
sanguines , et ceux, enfin, où il suffira de quelques styptiques ou de 
quelques substances absorbantes pour favoriser une coagulation que 
la plasticité du sang tend déjà d’clle-même à produire. 

La température extérieure, en agissant sur le liquide échappé des 
artères doit être prise aussi en considération : la chaleur trop intense, 
celle qui se développe sous des appareils placés aussitôt après les opéra- 
tions , en même temps qu’elle tend à augmenter l’action vasculaire 
locale , s’oppose à la formation des caillots oblitérateurs, qui s’établis- 
sent avec facilité , au contraire , lorsque les plaies et le sang sont sou* 
mis à l’impression tempérante d’un air frais. C’est sur ces observa- 
tions qu’est fondée la pratique heureuse adoptée dans un grand hôpital 
de Paris, qui consiste à ne penser les grandes plaies produites par 
l’ablation des parties considérables] qu’après que , recouvertes seule- 
ment d’un linge fin , elles ont cessé de fournir du sang par les petits 
vaisseaux que les ligatures n’ont pu atteindre. 

3®. Influence exercée sur les hémorrhagies par la force des contractions 
du eœur . Dans le plus grand nombre des cas , les effusions sanguines 
artérielles ne se ralentissent et ne s’arrêtent que lorsque le cœur, affai* 
bli, cesse d’agir avec son énergie normale, ou même suspend, du 
moins en apparence , ses contractions. Jusque-là , quelles que soient 
les qualités plastiques ou séreuses du sang, le flot qui survient chasse 
jusqu’aux derniers vestiges du flot précédent, les ouvertures vascu- 
laires sont incessamment balayées et aucune coagulation n’est possible.' 
Afin que la fibrine se rassemble et forme la base d’un, corps solide, 
il faut que le mouvement du liquidediminue de rapidité, et que ses 
élémens conservent pendant quelques instans la même disposition, 
dans leB endroits où ils doivent s’acoumuter. 

C’est assez souvent lorsque la syncope survient , et pendant qu’elle 


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( ^3 ) 

se prolonge, que la nature forme et dispose les caillots. C’est sur ce 
fait qu’est fondée la pratique des saignées abondantes qu’on oppose , 
avec raison , aux hémorrhagies intérieures , contre lesquelles l’art ne 
ne peut employer aucun moyen direct. Les réfrigérans externes, qui , 
réagissant sui* le cœur, rendent ses contractions moins énergiques , 
agissent d’une manière analogue. 

Lorsque la syncope cesse trop tôt, lorsque le centre de la circula- 
tion reprend son énergie avant que les caillots n’aient acquis une suf- 
fisante solidité, ceux-ci se détachent, les hémorrhagies se renouvel- 
lent, et les jours du sujet sont plus ou moins immédiatement menacés. 
De là encore le précepte adopté par les ma 1res de l’art , et qui con- 
siste à ne pas trop se hâter de relever, chez les malades atteints d’hé- 
morrhagies internes graves , les forces circulatoires affaiblies, soit par 
la perte morbide du sang , soit par les saignées pratiquées à dessein , 
soit enfin par les boissons et les applications froides. 

Il suffira sans doute de ce rapide aperçu pour faire sentir combien 
une observation physiologique exacte des phénomènes dès maladies 
est féconde en applications utiles au lit des malades. 


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DEUXIÈME PARTIE. 


Moyens que la chirurgie emploie pour arrêter les hémorrhagies 

artérielles. 


Si l'effusion du sang est un phénomène qui frappe instinctivement 
d’effroi la plupart des hommes et jusqu’aux animaux, en même temps 
qu’il provoque la diminution rapide des forces, la syncope et la mort, 
il est aussi celui contre lequel notre art conservateur a développé les 
plus puissans efforts. La première inspiration qu’a fait naître la vue 
d’une hémorrhagie abondante fut sans doute de se précipiter sur la 
source de l’écoulement sanguin , et de lui opposer sur le lieu même 
d’où elle jaillit des digues plus ou moins solides et méthodiquement 
disposées. La compression directe fut donc, selon toutes les vrai- 
semblances, le moyen que l’on employa d’abord; et les réfrigérans, 
les absorbans, les styptiques , fcf cautérisation, la ligature et la tor- 
sion n’ont été que les résultats successifs de combinaisons de plus en 
plus savantes, fondées sur des connaissances anatomiques et phy- 
siologiques incessamment perfectionnées. 

Étudions séparément la manière d’agir de chacun de ces moyens, 
et indiquons les procédés les plus convenables pour en faire l’appli- 
cation. 

ARTICLE PREMIER. 

De la compression , des absorbans et des styptiques. 

L'action mécanique par laquelle on ferme , en le pressant , le canal 
d’une artère ouverte , peut-être exécutée soit à l’extrémité même des 
vaisseaux , soit à des distances variables de la plaie , entre elle et le 


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( *5 ) 

centre de la circulation. La première, la plus ancienne, la plus na- 
turelle en quelque sorte , constitue la compression directe j la se- 
conde est désignée sous le nom de compression latérale. 

' Celse recommande déjà la compression directe ; il prescrit de rem- 
plir la plaie d’où s’écoule du sang de charpie sèche , par-dessus la- 
quelle une éponge trempée dans l’eau froide et un bandage com- 
pressif doivent être appliqués. Mais ce judicieux appréciateur des 
procédés de ses devanciers n’accordaU que peu de confiance à ce 
mode de pansement ; il signale comme devant lui être préféréés la 
charpie imbibée de vinaigre, la ligatùre ou la cautérisation avec le 
fer rouge. 

Afin de comprimer avec efficacité et méthode l’orifice d’une artère 
considérable ouverte à la surface d’une plaie extérieure, il faut placer 
sur cet orifice, à l’instant où l’on soulève la compresse ou le doigt 
avec lesquels on y suspendait l’effusion du Sang, une boulette de 
charpie solide que l’on soutient avec le doigt indicateur de la main 
gauche. Lechirurgien recouvre graduellement ce premier tampon avec 
d’autres boules de charpie, également. résistantes, qu’il entasse et 
presse les unes sur les autres, de manière à élever au-dessus de l’ou- 
verture de l’artère une pyramide , dont le sommet correspond au 
point d’où provient l’hémorrhagie, et la base aux compresses et au 
bandage déstinés à la soutenir. 

Si la plaie est étroite , profonde , et à parois assez résistantes pour 
soutenir seules l’agent de la compression, il suffit ordinairement de la 
remplir avec exactitude pour arrêter la sortie du sang. C’est ainsi 
que l’on ferme avec une tige de cire l’ouverture du trois-quarts , ou 
les plaies faites par des armes très-aiguës aux parois de l’abdomen, 
et dans lesquelles l’artère épigastrique a été atteinte. C’est ainsi encore 
qu’on entasse dans une alvéole d’où s’échappe du sangsoitdc la cire , 
soit de la charpie, que l’on maintient en faisant rapprocher les mâ- 
choires. Mais, dans la plupart des cas, la compression directe exige 
plus de précautions, et n’est pas, à beaucoup près, aussi efficace. 

Lorsqu’une plaie de peu d’étendue pénètre jusqu’à une artère vo- 

4 


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f 


( 26 ) 

lumineuse, comme l’artère brachiale pendant la saignée, on peut 
rapprocher les lèvres de la solution de continuité , pour placer sur 
èllc des compresses de plus en plus larges , de manière à y former un 
cône dont le sommet correspond à l’ouverture artérielle et la bqse 
au bandage plus ou moius serré dont on recouvre la. partie. Une 
ou plusieurs pièces de monnaie , enveloppées de linge et superposées 
au-dessus de la plaie , donnent alors plus de solidité à l’appareil et 
augmentent singulièrement l’épergiede la compression. Samuel Coopcr 
guérit de la sorte une blessure de l’arcàde palmaire superficielle , qui 
avait été ouverte chez une jeune dame , et qui fournissait une hé- 
morrhagie considérable (1 ). % 

Mais les compressions directes sont presque toujours fécondes en 
inconvéniens , et incertaines dans leurs effets. Pour qu’elles réussis- 
sent, il est indispensable que l’artère repose sur un plan solide qui 
la soutienne , et contre lequel elle appuie avec force. Cette dispo- 
sition se rencontre au crâne, sur quelques points de la face, à la 
partie inférieure de l’avant-bras , derrière la malléole interne , et sur 
quelques autres points de l’extérieur du corps. Plus les surfaces 
sont, dans ce cas, larges, planes et immobiles, plus la compression 
contre elles est facile et efficace ; lorsqu’elles sont , au contraire , ar- 
rondies, étroites, ou exposées à changer de direction relativement 
aux artères par les mouvemens qui leur sont imprimés, ilest presque 
impossible d’assujettir convenablement sur elles le vaisseau ouvert , 
et l’action compressive devient incertaine ou complètement nulle. 
C’est ce qui arrive dans presque toute l’étendue des membres. 

La compression directe est, de plus, toujours douloureuse et de- 
vient souvent insupportable. Si le plan contre lequel elle agit est so- 
lide , et si les corps qui servent à l’exercer sont durs , les tissus froissés 
par elle deviennent bientôt le siège de vives souffrances. Le peu d’éten- 
due des surfaces recouvertes par le sommet du cône renversé que 


(1) Dictionnaire de chirurgie pratique, vol. 1, art. Hémorrhagie. 


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( 2 7 ) 

représente l’appareil est encore une circonstance qui favorise alors 
la gène et la douleur que sa présence occasionne. 

Mais, dans beaucoup de cas, à ces inconvéniens s’ajoute l’inef- 
ficacité complètedu moyen hémostatique dont il s’agit. D’une part, les 
boules decharpie entassées dans la cavité de la plaie , élevées en pyra- 
mide au-dessus d’elle, s’affaissent aisément, roulent les unes sur les au- 
tres, et s’étalent en quelque sorte, de manière à agir sur des surfaces plus 
larges , et à cesser de comprimer avec une force suffisante le lieu d’où 
le sang tend à s’échapper de nouveau. D’un autre côté, l’artère ou- 
verte, si elle est plongée au milieu découches épaisses detissu cellulaire 
graisseux, ou séparée des os par des muscles considérables, cède à 
l’effort de l’appareil, s’enfonce dans les chairs, se dérobe à la com- 
pression , et , redevenue libre , permet à l’hémorrhagie de reparaître. 

Le chirurgien , dans ces cas , est donc placé entre deux ésueils éga- 
lement à redouter : la douleur insupportable, occasionée par des 
corps trop durs , trop épais , agissant sur des tissus que soutiennent 
des plans osseux trop rapprochés, et l'insuffisance de tamponne- 
mens trop mous , ou qui ne trouvent pas de point d’appui asseî so- 
lide pour rendre leur action suffisante. Ajoutons que fréquemment , 
aux membres surtout, les bandages à l’aide desquels on soutient les 
agens immédiats de la compression directe environnent les parties, 
gênent le retour du sang veineux, et occasionnent des accidens d’étran- 
glement qu’il n’est pas toujours possible de prévenir. 

Ces considérations ont engagé depuis long- temps les chirurgiens 
les plus sages à ne considérer le tamponnement des plaies compli- 
quées d’hémorrhagies artérielles que comme applicable seulement 
à un petit nombre de cas exceptionnels , et comme devant, dans tous 
les autres, ou n’être employé que temporairement, à défaut de 
moyens plus sûrs, ou être complètement rejeté ; ils accordent une 
juste préférence â la cautérisation, et surtout à la ligature des artères. 
Peut-être la torsion des extrémités des vaisseaux doit-elle partager 
avec ce dernier moyen les suffrages des praticiens, et même être gé- 
néralement employée. 


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Les absorbans, substances propres à s’emparer promptement de 
la sérosité du sang et à favoriser, en isolant sa partie coagulable, la 
formation des caillots au-devant des orifices des vaisseaux, n’ajoutent 
que peu à la puissance de la compression directe. La colophane,' 
l’agaric de chêne , la toile d’araignée, l’éponge très-fine et très-sèche, 
et les autres corps analogues sont sans utilité, si une pression 
suffisante ne les soutient appuyés contre les parties d’où le sang 
est disposé à sortir. Leur emploi ne dispense, en aucune manière, 
de donner à l’appareil un degré, considérable de constriction, et dès- 
lors ne diminue en rien les inconvéniens ou les dangers qui ré- 
sultent de son application. 

Les styptiques, tels que les dissolutions alumineuses, celles du sul- 
fate de fer ou de cuivre, l’eau de Rabel et les acides minéraux étendus, 
le vinaigré, etc. , présentent le double désavantage de ne presque 
rien ajouter à l’efficacité de la compression directe , qui est toujours 
indispensable lorsqu’on les emploie, et d’irriter par leur contact les 
surfaces saignantes et disposées à l’inflammation contre lesquelles 
elles sont appliquées. La condensation et’ la crispation des tissus que 
leur impression détermine ne sauraient arrêter que les hémorrha- 
gies en nappe, fournies par de très-petits vaisseaux : des actions 
aussi faibles sont insuffisantes contre les hémorrhagies provenant de 
sources plus larges ; et souvent la stimulation qu’en reçoivent les 
parties est telle que des congestions s’y produisent , et que des écou- 
lemens sanguins consécutifs s’y manifestent, au lieu d’y être suspen- 
dus ou arrêtés. 

De plus en plus pénétrés des incertitudes et des graves inconvé- 
niens attachés aux compressions exercées directement sur les plaies , 
et d’ailleurs éclairés sur les lois de la circulation sanguine, les chi- 
rurgiens furent conduits à penser que l’applatissement de l’artère 
blessée entre le cœur et la solution de continuité jouirait d’une ef- 
ficacité plus grande, et offrirait des avantages que refusait l’autre 
méthode. Cette pensée a donné naissance à la compression latérale 
des artères. 


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( “9 ) 

Les tubes artériels ne peuvent être comprimés dans leur trajet 
qu’autant que des os, placés derrière eux, fournissent, comme pour 
la compression directe , un point d’appui à leur applatisseraent. Sans 
cette condition, les artères, agitées par l’impulsion réitérée du sang 
que chasse le cœur, écartent graduellement les lames celluleuses envi- 
ronnantes, s’enfoncentdansles interstices des muscles, eten peu d’heures 
reprennent en grande partie leur liberté. Si cette compression est 
exercée à l’aide de liens qui entourent les membres, comme lors- 
qu’on applique le garrot, le retour du sang veineux est entravé , 
les parties situées au-dessous du point comprimé se tuméfient, de- 
viennent livides et peuvent même être frappées de gangrène. 

La pelote appliquée sur l’artère, et qui a pour objet d’augmen- 
ter la pression qu’elle doit éprouver, et de soulager en proportion les 
parties voisines, ne remédie qu’imparfaitement à cet inconvénient. 
Le tourniquet de J.-L. Petit , malgré les nombreuses modifications 
qu’il a subies, ne les fait pas même entièrement disparaître. Les deux 
plaques qui lui servent de base sont trop étroites pour que les rur 
bans, qui s’étendent de l’une à l’autre, ne compriment pas d’une 
manière défavorable la circonférence du membre, surtout lorsque 
celui-ci est volumineux. 

N’agir que sur deux points opposés des parties, et laisser libre le 
reste de leur étendue, telle est la principale condition que doivent 
remplir les instrumens de la compression latérale. Sous ce rapport, 
le compresseur de M. le professeur Dupuytren mérite incontestable- 
ment la préférence sur le tourniquet de Petit ; mais lorsqu’on pro- 
longe son application, aussi bien que celle de tous les instrumens 
analogues, dont l’action est circonscrite à d’étroites surfaces, la pres- 
sion exercée par la pelote mobile sur l’artère et les nerfs qui l’avoi- 
sinent devient graduellement gênante, puis douloureuse, puis into- 
lérable. Quels que soient le courage et la ténacité des malades, il 
est très-rare qu’ils en puissent supporter l’action pendant le temps 
nécessaire à la formation des caillots et à l’oblitération solide des 
plaies des artères. On sait que ces instrumens échouent également 
presque toujours dans le traitement des anévrysmes. Ils ne corv* 


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( 3 » ) 

viennent que pour suspendre temporairement le cours du sang dans 
les vaisseaux pendant la durée des grandes opérations de la chirur- 
gie, et en particulier durant les amputations; et encore sont-ils ordi- 
nairement alors remplacés avec avantage par la compression exercée 
par des aides intelligens. 

Plusieurs chirurgiens ont essayé de disséminer la compression la- 
térale sur de plus larges surfaces, espérant que, de cette manière, 
elle serait aussi puissante et plus facilement supportée : c’est ainsi que 
l’on a placé , le long du trajet des artères du bras ou de la cuisse, des 
compresses graduées, soutenues par des bandages roulés convena- 
blement serrés, et qui avaient pour objet de lutter contre l’effort du 
cœur et d’empêcher le sang d’arriver jusqu’à l’endroit d’où l’on dési- 
rait le détourner. Ce moyen n’avait été employé que dans le traite- 
ment des anévrysmes par la compression ; il forme la base des ban- 
dages de Faure y et surtout de Guattani, et dans ces cas même il ne 
jouit pas d’une grande efficacité. 

M. Koch père, de Munich, a imaginé d’employer ce moyen à la 
suite des amputations. « Comme après ces opérations nous voulons, 
dit le fils de ce praticien , presque exclusivement obtenir une réunion 
par première intention , nous appliquons toujours un appareil pour 
y parvenir, c’est-à-dire qu’après avoir recouvert l’os avec les parties 
charnues, nous enveloppons toute la surface de la plaie avec desban- 
deleltes agglutinatives bien adhérentes, et nous terminons le panse- 
ment , comme à l’ordinaire, avec la charpie, les compresses, etc. La 
compression de l’artère principale pendant l’opération est exercée 
très-convenablement par un aide; après l’application des bandelettes 
agglutinatives, la main de l’aide est remplacée par une compresse 
longuette fixée sur le trajet de l’artère au moyen d’une bande. 11 est 
presque inutile de remarquer ici avec quelle promptitude une am- 
putation doit être pratiquée, d’après une méthode dans laquelle on 
ne perd pas de temps à placer les ligatures. Lorsque le malade est 
reporté dans son lit, on a soin de donner au moignon une position 
un peu élevée, afin de diminuer encore l’afflux du sang; un aide 
exerce alors avec la main sur le moignon une douce pression, qu’il 


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( 3 . ) 

continue pendant une ou deux heures, et même aussi long -temps 
qu’il y ressent des pulsations considérables. Lorsqu’elles ont disparu, 
et que les pièces de l’appareil sont teintes en rouge par la lymphe qui 
a suinté, tout danger d’hémorrhagie consécutive a disparu, pourvu 
que le malade reste tranquille; bientôt aussi l’exsudation lympha- 
tique cesse, et l’appareil devient froid, entièrement sec et roide (1 ). » 

11 est évident que ce mode de compression ne saurait, à la cuisse 
ou au bras , après les amputations de ces parties , être porté assez 
loin pour empêcher les hémorrhagies par le moignon sans devenir 
douloureux et sans faire courir au malade le danger d’un étrangle- 
ment funeste des parties recouvertes par le bandage , ou placées au- 
dessous de ses limites inférieures. M. Koch fils ayant opéré suivant le 
procédé de son père, sous les yeux de M. Gracfîe, à Berlin , fut obligé 
de recourir aux ligatures , oe qui démontre jusqu’à quel point on doit 
peu compter sur l’efficacité d’un semblable moyen. On se demande, 
en lisant le récit de ces tentatives, si nous sommes revenus aux temps 
où la chirurgie , encore dans l’enfance , ne procédait d’après aucune 
régie assurée à l’arrêt des hémorrhagies. 

Les compressions , soit directes , soit latérales , par l’intermédiaire 
de quelques substances , ou à l’aide de quelque instrument qu’on les 
exerce , ne sont donc applicables que temporairement , lorsqu’il ne 
s’agit que de suspendre le cours du sang dans les vaisseaux , et jus- 
qu’à ce qu’on ait disposé des moyens hémostatiques plus simples , 
plus immédiats et plus sûrs ; elles doivent être rejetées dans toutes 
les circonstances où il faut prolonger leur action et arrêter définiti- 
vement les effusions sanguines. A toute rigueur , la compression laté- 
rale peut servir cependant d’addition à certains moyens , comme à 
l’application des absorbans et à la cautérisatiou, dont il va être ques- 
tion : elle a pour objet alors de modérer l’impulsion du sang; et, 
sans avoir besoin d’être portée aussi loin que lorsqu’on l’emploie 
seule, elle agit avec un certaine efficacité et devient utile. 


(1) Remarques sur l’amputa tio a, etc. — Journal des progrès, etc. , 4 . 5 , p. 136. 




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( 5 = > 


ARTICLE II. 

De la cautérisation. 

L’application des métaux incandescens aux orifices béans des ar- 
tères est un des procédés hémostatiques les plus anciennement usités 
en chirurgie. Si l’on en croit les annales de la science , des opérations 
importantes et même des amputations ont été exécutées avec des cou- 
teaux rougis au feu , afin que les parties fussent cautérisées en même 
temps que coupées, et que les extrémités vasculaires , recouvertes d’es- 
charres , ne pussent fournir aucune hémorrhagie. 11 y a sans doute 
beaucoup d’exagération dans ces récits : on conçoit difficilement que 
des instrumens tranchans soient susceptibles de se pénétrer d’assez de 
calorique pour n’étre pas bientôt refroidis par le contact des liquides, 
et pour agir de manière à brûler fortement les parties profondes 
et les artères qui s’y rencontrent. Ge moyen n’a , selon toute appa- 
rence, jamais réussi, au moins pour les grandes amputations. 

C’est donc après , et non pendant les opérations , que la cautérisa- 
tion des vaisseaux doit être pratiquée. Pour quelle réussisse, il im- 
porte que le cautère dont on fait usage soit chauffé à blanc , qu’on 
l’applique sur l’orifice de l’artère, à l’instant même où l’on soulève la 
boulette de charpie avec laquelle on le comprimait en abstergeant son 
humidité ; enfin , il est utile de ne le laisser en contact avec les par- 
ties que durant peu d’instans, et de le retirer avant qu’il soit entiè- 
rement refroidi. Aussitôt qu’on le retire , il doit être remplacé par de 
la charpie, avec laquelle on soutient l’escharre qu’il vient de faire, et 
qu’on soulève de nouveau pour pratiquer une seconde cautérisation , 
si la première semblait insuffisante : si le cautère n’était que rouge- 
brun ou rouge cerise à l’instant où on l’applique , il ne dessécherait 
pas suffisamment les parties qu’il touche, et emporterait , adhérente^ 
à sa surface, l’escharre légère et molle qu’il aurait produite. 

La cautérisation a pour effet de réduire en un charbon plus ou 


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< 53 ) 

moins épais, solide et adhérent aux tissus sous-jacens, les parties que 
le métal incandescent a touchées. Le sang lui-même contribue, par 
son albumine , sa fibrine et sa matière colorante, à la formation de 
cette croûte inorganique , qui ferme le vaisseau ouvert , et oppose , 
extérieurement, une digue à l'hémorrhagie, jusqu’à ce que le caillot 
interne soit formé. Si , à raison du voisinage de quelque branche col- 
latérale volumineuse, ce caillot ne peut s’organiser, la chute de l’es- 
charre est accompagnée du renouvellement de l’effusion sanguine : il 
en est de même lorsque, trop faible et trop peu adhérente pour résis- 
ter à une impulsion circulatoire énergique , eMe cède et se détache 
prématurément. C’est afin d’éviter ces accidens fâcheux que la cau- 
térisation doit presque toujours être suivie d’une compression di- 
recte, modérée, qui soutienne l’escharre et s’oppose à sa séparation 
•trop rapide, ainsi que d’une compression latérale susceptible de 
diminuer l’effort circulatoire, qui tend incessamment à la soulever. 
Au surplus , ce procédé ne réussit généralement que contre les hé- 
morrhagies fournies par des vaisseaux de médiocre volume. Les ou- 
vertures des artères principales des membres ne sauraient être obli- 
térées par son emploi, à raison de la force d’impulsion que la co- 
lonne du sang y présente, et qui surmonte aisément la faible résis- 
tance que. les escharres lui opposent. On doit alors d’autant moins 
insister sur la cautérisation que, lorsqu’elle a échoué, les extrémités 
brûlées des vaisseaux, sont enfoncées davantage dans les chairs, en- 
tourées de parties euflammées, et dès-lors fort difficiles à découvrir 
et à lier. 

La cautérisation, toutefois, fatigue moins les plaies que le tampon- 
nement direct, et doit souvent lui être préférée. Elle convient sur- 
tout dans les plaies étroites, au fond desquelles il est impossible de 
porter des ligatures. C’est ainsi qu’qu cautérise les vaisseaux ou- 
verts .profondément durant du cystotomie sous-pubienne; on a éga- 
lement recours, avec de grands avantages, au même moyen , 
après les opérations pratiquées dans l’intérieur de certaines cavités , 
telles que celles de la bouche ou des fosses nasales ; enfin, il est indi- 

5 


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c 34 ) - 

qué de recourir à l’emploi du cautère. toutes les fois qu’en même 
temps qu'il s’agit d’arrêter des hémorrhagies abondantes et en nap- 
pe , on veut achever de détruire les parties altérées sur lesquelles on 
a porté les instrumens. La cautérisation doit être pratiquée, d’après 
cette considération , à la suite des excisions partielles de la langue et 
de quelques autres organes cancéreux ; on cautérise également avec 
succès les surfaces osseuses ramqllies , d’où suinte , après la résection 
des parties cariées, une quantité quelquefois considérable de sang. 

Le cautère actuel peut être opposé avec succès non-seulement aux 
hémorrhagies , mais encore aux extravasations de certains liquides 
renfermés dans des réservoirs spéciaux , tels que la bile , l’urine et , 
peut-être , les matières intestinales. Le raisonnement et l’analogie 
semblent indiquer que le feu doit agir avec une facilité presque 
égale sur toutes les humeurs qui contiennent des matières concresci- 
bles et susceptibles, en se solidifiant, de se combiner avec les élémens 
organiques des tissus ; mais cette présomption avait besoin d 'être 
justifiée par les faits. M. Amussat , voulant acquérir sur ce point une 
entière certitude, eut l’idée de recourir à quelques expériences , qu’il 
m’admit à exécuter avec lui , et dont je vais rendre compte. 

Une incision ayant été pratiquée sur un chien de moyenne taille, à 
la partie supérieure droite de l'abdomen r les muscles furent succes- 
sivement divisés , et l’on arriva dans la cavité péritonéale. L’épiploon 
et de nombreuses circonvolutions de l’intestin grêle s’échappèrent 
aussitôt, ainsi qu’on l’observe ordinairement , à travers la plaie par 
l'effet des violens efforts auxquels se livrait l’animal. Cependant, après 
avoir contenu et abaissé ces parties , il fut aisé de découvrir dans la 
profondeur de la plaie le fond de la vésicule biliaire et de la piquer 
avec la pointe d’un bistouri droit : un petit cautère avait été préparé 
à l’avance, et il fut aussitôt appliqué y chauffe jusqu’au blanc , sur la 
division qui venait d’être pratiquée, et d’où suintait une bile verdâtre 
et visqueuse. L’écoulement s’arrêta aussitôt; une escharrc noire et 
solide oblitéra l’ouverture traumatique, et, après avoir fait rentrer les 
intestins et l’épiploon, nous réunîmes, à l’aide de quelques points de 
suture, les lèvres de la plaie extérieure. 


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• ( 35 ) 

. L’animal ne donna , pendant tout le reste de la journée , aucun 
signe de douleur; il devint ensuite triste, perdit l’appétit, et suc- 
comba le cinquième jour de l'expérience. 

L’examen du cadavre ayant été fait avec soin , nous constatâmes , 
M. Amussate t moi, les dispositions suivantes : i°. des adhérences in- 
times unissent l’épiploon au contour interne de la plaie des parois 
abdominales ; 2 *. il n’existe pas la moindre trace d’épanchement bi- 
liaire dans la cavité du péritoine; 3°. le fond de la vésicule adhère 
légèrement au duodénum. On ne peut apercevoir d’abord l’endroit où 
cette poche a été ouverte et ensuite cautérisée. Comme elle est en 
grande partiecachéc par les parois latérales de la scissure hépatique qui 
la renferme , il faut écarter avec ménagement les bords de cette exca- 
vation, et détruire les adhérences nouvelles qui les ont UDis à la sur- 
face de l’organe lui-même. Nous apercevons alors une petite mem- 
brane transparente, qui marque le lieu correspondant à l’incision 
ainsi qu’à l’application secondaire du cautère actuel ; mais on ne voit 
pas à cet endroit la trace la plus légère de l’escharre , qui a été ma- 
nifestement absorbée. Le canal cystique ayant été ensuite coupé , et 
la vésicule entière détachée , nous pûmes examiner sa surface interne : 
elle contenait une bile très-épaisse et très-foncée. Après l’avoir lavée , 
nous remarquons qu’il existe à l’endroit de la piqûre un petit point 
noir ; la membrane interne semble présenter un reste de perforation 
qui , à l’extérieur, est bouché par la fausse membrane ou la cicatrice 
formée à la surface de la vésicule. 

Encouragés par cet heureux essai , nous répétâmes la même expé- 
rience avec plus de ménagemens et de méthode. Une incision fut 
d’abord pratiquée , en commençant à la partie supérieure de la ligne 
blanche et en suivant le rebord inférieur des côtes asternales droites, 
dans l’étendue d’environ trois pouces. La division successive des 
muscles et du péritoine étant opérée, nous pénétrâmes dans le ventre ; 
l’épiploon et quelques circonvolutions de l’intestin grêle , qui se pré- 
sentèrent à la plaie furent abaissés , et nous découvrîmes, avec la plus, 
grande facilité, la surface concave du foie, ainsique la vésicule biliaire. 


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( *n 

U» spéculum uleri glissé desi la- plaie , vers le résetreir de la bile , 
s’appliqua Sans difficulté à sa partie la plu» dédiVe, qui parut en évi- 
dence dans la cavité de l'instrument ,- et qûi était embrassée de toute» 
part, de la manière lai plus- exacte, par son rebord profond : il n’y 
avait autour' de la vésicule qu’une portion du foié et On pen d’épi- 
ploon. 

Ces dispositions étant faites* nous portâmes dans la cavité du spé- 
culum un scalpel à labié très-aiguë, dont la pointe fut enfoncée dans le 
réservoirde la bile ; l’écoulement de ce liquide par la petite plaie annonça 
la pénétration de l’instrument. Après avoir abstergé, à l’aide d’un mor* 
ceau d’éponge fine , adapté à de longues pinces , la bile qui suintait 
de la piqûre < nous portâmes sur celle-ci un petit cautère chauffé jus- 
qu’au rouge; une escharre noirâtre et solide s’y forma aussitôt, au- 
cune trace de liquide ne parut plus. Rassurés, dès-lors, contre l’épan- 
chement, nous retirâmes le spéculum et après avoir réduit les vis- 
cères , nous réunîmes la plaie extérieure par première intention. 

Aucun signe de douleur* aucune altération appréciable de la santé 
de l’animal ne se manifeste pendant les joui*s suivans; l’appétit se 
conserve* ainsi que la disposition au mouvement : enfin, rien de re- 
marquable ii’étant survenu jusqu’au quatorzième jour, nous sacri- 
fions alors l’animal , en faisant d’autres expériences sur la torsion des 
artères. 

Ici , comme dans le cas précédent , ce qui nous frappe d’abord , 
après avoir ouvert l’abdomeu , est le peu d’étendue de la portion de 
la vésicule qu’on peut apercevoir. Ge réservoir est presque entière- 
ment recouvert jiar les bords de la scissure dans laquelle il est logé , 
et qtii adhèrent à sa surface. En disséquant avec précaution ces par- 
ties , nous constatons que les adhérences sont surtout intimes et ré- 
sistantes à l’endroit dè la Vésicule, qui a été ouvert et cautérisé. A 
l’instant bù nous arrivons à l’escharre elle-même , elle se détache et 
reste adhérente à la portion de la scissure qui lui correspond ; la vési- 
cule se vide en partie de la bile quelle contient , et ne présente d’ail- 
leurs rien de particulier. 


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( 3 7 ) 

J’ai cru convenable de faire représenter par une figure exacte le 
résultat ~de cette opération, ainsi que la disposition des partie» (i). 

Après ces Succès , nous résolûmes d’expérimenter sur la vessie uri- 
naire. Une incision de deux pouces d’étendue fut pratiquée à la partie 
inférieure de la ligne blanche , sur un chien de moyenne taille* On 
pénètre ainsi dans la cavité du péritoine , et le» doigts de la main 
gauche, portés derrière le pubis, servent à saisir la vessie et l’attirer 
au dehors : celte manœuvre s’opère sans difficulté , malgré la con- 
traction des fibres charnues de l’organe, qui expulsent en cet instant 
l’urine qu’il renfermait. 

On plonge ensuite dans les parois de la poche urinaire , tenue entre 
les doigts , la pointe d’un scalpel ; quelques gouttelettes de liquide 
paraissent à l’extérieur, et l’on cautérise immédiatement la plaie. La 
vessie est réduite aussitôt, et l’on procède à la réunion des lèvres de 
la division extérieure des parois de l’abdomen. 

L’animal n’avait, au cinquième jour de l’opération, donné aucun 
signe de souffrance ou de maladie. Nous le sacrifions alors pour des 
expériences sur la torsion des artères. 

Le ventre ayant été ouvert , on ne peut y reconnaître la moindre 
trace d’épanchement. L’épiploon est venu contracter des adhérences 
avec l’endroit cautérisé. La vessie est fortement contractée sur elle- 
même; sa cavité, incisée, permet d’apercevoir à l’intérieur un petit trou 
dont la partie externe est fermée parle péritoine et l’épiploon, qui 
adhère à ses bords. 

Ces expériences n’offrent peut-être encore d’autre intérêt que celui 
de la curiosité ; cependant les faits ne sauraient être complètement 
stériles , et le temps amène presque toujours à sa suite l’occasion de 
les utiliser. On sait que M. Campaignac . , dans un très-bon Mémoire , 
lu en 1826 (2) à l’Académie royale de médecine, a proposé la liga- 


(1) Voyez la planche première. 

(2) Ce Mémoire a été publié dans le Journal hebdomadaire de médecine 

t. 1 , p. 204. 


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( 38 ) 

turc pour ferma? les plaies faites à la vésicule biliaire soit par des instru- 
mens vulnérans, soit dans l’intention d’en extraire des calculs devenus 
apparens , au toucher, à travers les parois du ventre. Si l’on parvenait 
à déterminer rigoureusement , par des expériences précises , l’étendue 
des divisions dont l’application du feu est susceptible d’opérer avec sû- 
reté l’oblitération , ce moyen ne pourrait-il pas être préféré à la liga- 
ture ? D’abord, il présenterait les mêmes avantages immédiats ; il serait 
ensuite d’un emploi plus facile et plus prompt ; enfin , il n’obligerait 
pas à laisser dans l’abdomen un corps étranger, dont la présence est 
une cause active d’inflammation et retarde de beaucoup la cicatrisa- 
tion de la plaie extérieure. Une canule* de métal, ou un spéculum 
construit sur de petites dimensions , tels que ceux qui servent à pro- 
téger, dans d’autres occasions, de l’action du feu les parties à travers 
lesquelles les cautérisations doivent être exécutées , rendraient cette 
opération aussi prompte que facile et sûre. J’abandonne , au surplus, 
ces réflexions au jugement des praticiens éclairés. 

ARTICLE III. 

De la ligature. 

Déjà indiquée , mais d’une manière vague et incomplète , dans les 
écrits d’Hippocrate j de Celse et de Galien, la ligature des vaisseaux à 
l’instant où ils fournissent des hémorrhagies était tombée dans le 
plus profond oubli , lorsque le restaurateur de la chirurgie moderne , 
l’immortel Parê t la découvrit de nouveau, démontra ses avantages, 
et la fit adopter comme le procédé hémostatique le plus efficace et le 
plus simple. Au siècle encore barbare où vivait ce grand homme, des 
cautérisations cruelles et dépourvues de méthode, des compressions 
immédiates exercées avec toijte la violence qu’inspire la crainte exagé- 
rée d’un péril devant lequel on est sans défense, étaient les seuls moyens 
que l’art opposât au plus grand nombre des hémorrhagies. Des acci- 
dens aussi nombreux que funestes accompagnaient fréquemment 


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( 3 » ) 

l’emploi de pareils moyens , ou étaient la suite de leur application ; et 
tels étaient les dangers attachés aux effusions sanguines artérielles à 
la suite des opération^ ou des blessures, qu’on est disposé à croire, 
avec Paré j que l’idée de leur opposer la ligature des artères fut le ré- 
sultat d’une inspiration toute divine. 

Mais la ligature immédiate des vaisseaux, conseillée et pratiquée 
d’abord par l’illustre maître de Guillemeau, fut bientôt livrée à l’es- 
prit de controverse qui dominait alors, et surtout aux efforts jaloux 
de ces hommes si multipliés dans tous les temps , qui cherchent à dé- 
pouiller le génie en mutilant ses travaux. 

Après une foule d’essais et plus d’un siècle de discussions achar- 
nées , deux méthodes se disputèrent pour la ligature des vaisseaux les 
suffrages des chirurgiens : l’une consistait dans la ligature médiate, 
l’autre dans la ligature immédiate des artères. 

i°. Lier les artères d’une manière médiate , consistait à comprendre 
avec elles, dans l’anse du fil destiné à les étreindre, une épaisseur 
plus ou moins considérable des tissus qui les environnent. La pointe 
d’une aiguille courbe , armée d’un fil ciré, était portée au-dessus et à 
quelque distance de l’orifice artériel , autour duquel elle décrivait un 
demi-cercle. Après l’avoir dégagée inférieurement , on l’enfonçait de 
nouveau et on la faisait ressortir en lui faisant suivre une courbe op- 
posée à la première, non loin de l’endroit par où elle était entrée 
d’abord. Le vaisseau était alors entouré , à des distances variables , 
d’une anse de fil qu’on serrait , à la surface de la plaie, par un nœud 
simple, surmonté d’un second nœud. 

Quelquefois, lorsque l’artère était superficielle, comme la crurale, 
à la cuisse, la brachiale ou l’axillaire , à l’aisselle et au bras, on en- 
fonçait, à quelque distance de la plaie, à travers la peau, une ai- 
guille courbe, qui, contournant profondément le tube artériel et res- 
sortant au côté opposé à son entrée, conduisait au-dessous de lui le 
fil ciré destiné à l’étreindre. Afin de ménager les tégumens , et peut- 
être aussi dans l’intention de rendre moins douloureuse l’action com- 
pressive de la ligature , on plaçait entre ses extrémités une compresse 


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( 4 » ) 

pliée en plusieurs doubles, sur laquelle on liait les fils , et qui proté- 
geait la peau contre leur action. On voit encore ce procédé conseillé 
et mis en usage à la fin du siècle dernier, dans quelques cas d’ané- 
vrysme, ou afin de prévenir des hémorrhagies considérées comme 
trop dangereuses , dans des amputations pratiquées à la base des 
membres. 

La ligaturé médiate , pratiquée à la surface même des plaies ou au 
dessus d’elles , dans la continuité des membres, présentait d’abord 
l’immense inconvénient d’exposer à blesser avec la pointe de l’aiguille 
soit les troncs nerveux du voisinage , soit les veines satellites des ar- 
tères , soit enfin les tubes artériels eux-mêmes. Des douleurs atroces , 
des phlébites toujours dangereuses , ou l’inutilité absolue de l’opéra- 
tion , étaient les résultats inévitables de l’un ou de l’autre de ces acci- 
dens. En supposant que les fils fussent placés de la manière la plus 
heureuse , si oh les serrait trop , ils divisaient à l’instant même les par- 
ties charnues , affaissaient les lames celluleuses , et se rapprochaient 
tellement des parois de l’artère qu’elles en étaient froissées et rompues 
comme si la ligature eût été primitivement immédiate. Si, au con- 
traire, on ne serrait que médiocrement l’anse des fils , les parties «rap- 
prochées à raison de l’effort exercé sur elles , incessamment soumises 
à l’impulsion de la colonne du saug que chasse le cœur , continuant à 
s’affaisser , diminuaient déplus en plus de volume, et fin'ssaient 
par laisser à leur centre une voie libre à des hémorrhagies secon- 
daires. Enfin , lorsque des lames fibreuses , telles que des portions 
d’aponévrose, des tendons' peu volumineux, des cloisons intermus- 
cnlaires avaient été comprises dans les ligatures médiates, ces élémens 
organiques ne jouissant que d’une vitalité obscure et lente , tardaient 
long-temps è se détacher, et retenaient les fils dans les plaies durant 
des semaines et même des mois , retardant ainsi leur cicatrisation , 
prolongeant la convalescence des malades , elles exposant à toutes les 
chances qü’cntraînent avec elles des suppurations persévérantes, dont 
l’influence est rarement sans danger pour l’ensemble de l’organisme. 

2*. La ligature immédiate a donc dû prévaloir sur celle qu’on avait 


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( 4 » ) 

tenté de lui substituer , et maintenant elle est généralement adoptée 
dans la pratique chirurgicale. Saisir à la surface des plaies les extré- 
mités ouvertes des artères , les attirer légèrement au-dehors , porter 
sur elles l’anse d’un fil ciré plus ou moins volumineux , et le serrer 
avec une force suffisante , de manière à laisser au-devant du nœud une 
portion du vaisseau assez longue pour le retenir , tels sont les temps 
principaux de cette opération , trop simple d’ailleurs et trop familière 
aux praticiens pour qu’il convienne de la décrire minutieusement ici. 

.Mais si, en se conformant aux préceptes généralement recomman- 
dés , il est facile, lorsqu’on agit sur des artères volumineuses, de ne com- 
prendre que leurs parois dans l’anse des ligatures, il devient presque 
impossible, lorsqu’on lie des vaisseaux très-déliés, de ne pas entraîner 
avec les pinces destinées à les saisir quelques-uns des tissus voisins, 
et dès-lors de ne pas fomber , au moins eu partie , dans les inconvé- 
nieus des ligatures médiates. Les veines et les nerfs satellites sont alors 
souvent étreints, ce qui donne lieu à des accidens plus ou moins 
graves, souvent observés dans la pratique, et dont l’influence sur les 
résultats généraux des grandes opérations ne saurait être méconnue. 
Isoler dans tous les cas , d’une manière exacte, les parois des artères 
de toùtes les parties environnantes , était donc rendre à la chirurgie 
un éminent service , et faire disparaître un des plus graves inconvé- 
niens que l'on puisse reprocher aux ligatures. M. Amassai nous semble 
avoir indiqué les moyens les plus sûrs d’atteindre ce but, et l’on ne 
saurait trop insister sur les préceptes qu’il a établi afin d’y parvenir. 

Ainsi que cet habile chirurgien le fait observer, trois cas très-diffé- 
rens peuvent se présenter dans l’isolement et la ligature des artères. 

A. On peut avoir à saisir et à isoler les extrémités artérielles à la 
surface d une plaie faite par amputation ; 

B. L’artère sur laquelle on doit agir peut être comprise dans une 
plaie faite sur la continuité d’un membre ; 

C. L’artère à lier est quelquefois intacte clans l’endroit où il est in- 
diqué de la découvrir et de l’oblitérer. 

Afin de procéder, dans le premier -cas, à la ligature des artères 

6 


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( 4a ) 


avec toute l’exactitude et la précaution que cette opération souvent 
délicate exige , il importe, selon le conseil de M. A mussat , d’être muni 
de deux pinces, dont l’opérateur tient une de chaque main. Ces pinces, 
<^ites à torsion, diffèrent de celles dont on fait communément usage: 
les extrémités de leurs branches sont arrondies , mousses et allongées; 
elles portent à leur talon un petit bistouri, nommé bistouri tenacutum , 
dont la lame est recourbée et tranchante sur sa concavité; enfin , 
une de leurs branches supporte à sa partie extérieure un verrou , 
qu'on fait aisément glisser avec le pouce , et qui sert à maintenir l’ins- 
trument exactement et solidement fermé. Afin de faire mieux com- 
prendre la construction de ces pinces , dont l’usage deviendra sans 
doute général , je les ai fait représenter dans la planche seconde , à 
l’explication de laquelle je renvoie. 

Les artères à lier sont de trois ordres : les unes , volumineuses , 
béantes, dans lesquelles le sang est arrêté par la compression que les 
aides exercent, sont faciles à découvrir à raison de leur situation 
constante sur les points que l’anatomie indique. Les artères du second 
ordre reçoivent souvent du sang par les anastomoses des branches 
nées du tronc principal, au-dessus de la compression. Dans beau- 
coup de cas, durant les extirpations, par exemple, on a fait placer 
sur leurs ouvertures les doigts des aides qui, en les comprimant, y 
ont déterminé la formation de caillots temporaires. Ces doigts servent 
de jalons pour leur recherche ultérieure. On reconnaît d’ailleurs 
leur présence, en écartant les tissus voisins, à leur couleur violette 
et à leur saillie légère ; elles sont ordinairement placées dans le tissu 
cellulaire , et marchent entre les faisceaux des muscles. 

Les artères du troisième ordre, les plus ténues et les plus faibles, 
se rencontrent spécialement entre les fibres charnues, dans les masses 
musculaires , le long de quelques filets nerveux ou près des tendons. 
On les reconnaît au petit caillot rosé et vermeil qui les termine, et 
dont la couleur se distingue de la tranche brunâtre et foncée des 
.muscles, aussi bien que de la teinte blanche des lames celluleuses 
ou des cordons nerveux et fibreux. En écartant les parties voisines > 


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' ( 43 ) 

en passant le doigt sur les orifices de ces artérioles, du sang en suinte 
aussitôt y. et en remontant le long du sillon qu’il trace , on arrive bien- 
tôt à l’ouverture qui lui donne issue. 

Quel que soit le vaisseau qu’il s’agisse de lier , son extrémité étant 
reconnue , le chirurgien doit la saisir obliquement avec les mords 
d’une, des deux pinces, qu’il fixe aussitôt dans l’état de rapprochement, 
en poussant le petit verrou dont la branche correspondante au pouce 
est surmontée. En aucun cas il ne faut introduire une des branches 
de l’instrument dans le calibre de l’artère : les tuniqudf interne et 
moyenne de cet organe sont trop faibles pour ne pas céder à la pression 
exercée sur elles. On s’exposerait donc à les voir se déchirer dans l’in- 
l’instrument , et par suite à être obligé de les ressaisir de nouveau à 
une plus grande profondeur. Le bout du vaisseau étant saisi, en to- 
talité et d’un côté à l’autre , on l’attire par une traction légère, et on 
le fait saillir à la surface de la plaie; c’est alors qu’avec un des mords 
de l’autre pince, ou avec la pointe du bistouri tenaculum , dont son 
talon est armé , on détruit avec ménagement les adhérences de la 
gaine celluleuse et des parties voisines aux parois de l’artère , et que 
l’on refoule ces parties de bas en haut vers l’intérieur de la plaie. 
Comme il est rare que l’on réussisse du premier coup à saisir l’extré- 
mité artérielle assez haut, on la reprend avec la seconde pince portée 
au-dessus de la première, et l’on continue à la séparer jusqu’à une 
distance convenable des parties adjacentes qui pourraient être entraî- 
nées avec elles. Les filets nerveux , les bandes fibreuses comprises d’a- 
bord avec le vaisseaux entre les mords de la pince fixe, doivent 
être coupes avec le iistouri tenaculum , ou dégagés l’une des 

branches de l’autre pince. On reconnaîtra toujours que l’isolement 
est complet, â la facilité avec laquelle l’artère , à raison de son élasti- 
cité, obéit à la traction qui tend à l’allonger et à la faire proéminer 
au-delà de la solution de continuité. Toutes les fois que cet allonge- 
ment éprouve des obstacles , ils dépendent de ce que quelque partie 
comprise avec le vaisseau dans la pince retient celle-ci contre le fond 
de la plaie , et Tempôche de s’éloigner. 


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( 44 ) 

Les plus petits filets comme les plus gros troues artériels sont sus- 
ceptibles d’être , selon ce procédé , saisis , isolés et rendus libres , pour 
ainsi dire , à la surface des plaies , après les amputations et toutes 
les opérations analogues. Il n’y a pas jusqu’aux artères des os , qu’avec 
de l’attention , l’on ne puisse pincer et rendre saillantes , ainsi que 
M. Amussât s’en est assuré par l’expérience. ■ 

Dans le second cas, dont j’ai établi plus haut la distinction, c’est- 
à-dire lorsqu’une artère volumineuse est intéressée dans uue plaie 
plus ou moins profonde , le chirurgien , en plongeant son doigt au 
fond de la solution de continuité, l’applique sur le point d’où jaillit 
le sang. Une résistance très-distincte, Une sorte de mamelon saillant 
et pulsatif indique la présence de l’orifice du vaisseau ; la pince fixe 
étant glissée sous le doigt jusqu’à ce mamelon , saisira l’artère à la 
surface des tissus comprimés. Si , comme cela devra souvent arriver , 
elle n’est prise par l’instrument que dans le tiers, le quart, ou moins 
encore de sa circonférence, avec des nerfs ou d’autres parties , il im- 
porte assez peu , parce que, avec la seconde pince, conduite sur la 
première , il sera facile de la saisir d’une manière plus exacte , et après 
deux ou trois reprises on y parviendra certainement. Rien , dès-lors, 
ne pourra s’opposer à ce qu’on isole le vaisseau en suivant les pré- 
ceptes précédemment indiqués, de manière à se rendre maître de 
Tbémorrhagie. Si du sang sortait par le bout inférieur , on devrait le 
faire comprimer par un aide, jusqu’à ce que le bout supérieur fut 
lié ou tordu , et pratiquer ensuite sur lui les mêmes manœuvres. 

Si enfin le chirurgien voulait appliquer le même procédé à l’obli- 
tération dej artères dans la contiuuité des membres , afin de guérir , 
par exemple , un anévrysme ou de remédier à quelque hémorrhagie 
cachée ou consécutive , il faudrait agir encore selon des règles analo- 
gues : les incisions à l’aide desquelles* on arrive jusqu’à l’artère qu’on 
se propose de lier étant pratiquées , et sa gaine celluleuse étant ou- 
verte, on la reconnaît toujours à sa teinte d’un bleu pâle, qui contraste 
avec la couleur plus foncée de la veine , à sa rénitence , à la solidité 
de ses parois , et surtout aux pulsations qui l’agitent ; il faut alors la 


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( 45 ) 

saisir d’un côté à l’autre avec les mords de l’une des pinces que l’on 
fixe, puis la relever un peu, pendant qu’avec unedes branches de l'autre 
pince, ou avec la pointe de son bistouri tenaculum, on refoule en haut et en 
bas les tissus environnans.Un espace libre étant ainsi pratiqué , le chi- 
rurgien pourra, à son choix , opérer ou la ligature, ou la torsion. Dans 
ce dernier cas , la seconde pince sera placée à quelque distance de la 
première, puis fixée ; l’artère pourra ensuite être coupéeentre les deux 
mstrumens , et ses deux bouts seront dès-lors tordus sans obstacle. 

Il n est pas de mon sujet de comparer ce procédé d’oblitération des 
vaisseaux dans la continuité des membres avec la ligature perma- 
nente ordinaire, d’ailleurs si simple et si facile à appliquer; je ne 
veux pas même le mettre eu parallèle avec l’aplatissement tant vanté 
par Scarpa, et mis avec succès en usage en France. Il me suffit d’é- 
tablir, que si l’on revenait aux idées soutenues avec talent par M. Mau- 
noir, et que l’on crût utile de diviser les artères entre deux ligatures 
dans la continuité des membres, la manière indiquée par M. Amus- 
sat pour arriver à ce but -pourrait offrir quelques avantages , ou du 
moins n'être pas inférieure à celles qui ont été indiquées jusqu’ici. 

L’isolement complet et assuré des tuniques artérielles est un per- 
fectionnement incontestable apporté à l’opération de 1$ ligature. Ce 
procédé rend l’action des fils plus immédiate et plus sûre. Il n’oblige 
pas l’aide chargé de placer la ligature de la porter profondément 
dans les parties au moyen dés doigts indicateurs ou des pouces, au 
risque de comprendre avec elle les nerfs, les lames fibreuses, les 
fibres charnues du voisinage , ou de serrer le lien si près de l’extrémité 
du vaisseau qu’il est chassé par le sang, et tombe , soit aussitôt qu’on 
ôte la pince, soit quelque temps après que le pansement est ter- 
miné. Les tuniques artérielles , n’étant plus retenues par les tissus 
pincés avec elles, peuvent toujours être allongées de plusieurs lignes 
au-delà de la surface de la plaie. Il est donc facile à l’aide de serrer 
l’anse du fil au niveau de cette surface en voyant ce qu’il fait , et en 
s’assurant , ainsi que le chirurgien , qu’aucune partie étrangère n’e9t 
embrassée. Après la ligature , l’artère abandonnée à elle-même re- 


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' 46 ) 

prend sa situation normale et s’enfonce dans les chairs, entraînant 
avec elle les fils qui l’étreignent , et qui remontent à une hauteur 
à laquelle il eût été absolument impossible de les porter selon le pro- 
cédé ordinaire , ce qui ne peut manquer d’ajouter à la solidité avec la- 
quelle ils tiennent à l’extrémité du vaisseau et à la force de l’obstacle 
qu’ils opposent à l’impulsion du sang. 

Les substances employées pour former les ligatures ont été l’objet de 
sérieüses réfléxions et d’une multitude de tentatives. Les fils consti- 
tuent au milieu des plaies de véritables corps étrangers, qui s'opposent, 
dans tout le trajet qu’ils parcourent, à la réunion immédiate des par- 
ties, et qui, lorsqu’on les renferme, en les coupant très-près de leur 
nœud , déterminent presque constamment des abcès , avec le pus 
desquels les anses qu’ils forment autour des extrémités des vaisseaux 
sont expulsées. Afin de prévenir ces accidens et d’assurer la réunion 
parfaite et par première intention des solutions de continuité pro- 
duites par les grandes opérations , et spécialement par les amputa- 
tions des membres, plusieurs chirurgiens, d’après M. le docteur 
Physick , de Philadelphie , s’efforcèrent de composer les ligatures de 
matières animales', susceptibles d’absorption, dont les élémens seraient 
dissociés par l’action organique et entraînés dans le torrent de la circula- 
tion. Les liens de corde â boyaux , les lanières de tissu fibreux , les cor- 
dons nerveux et plusieurs autres substances analogues furent proposés; 
mais aux éloges dont quelques-unes d’entre elles ont été l’objet succéda 
bientôt la démonstration que ces ligatures ne sont ici plu s amies, pour 
ainsi dire, des tissus vivans,ni moins sûrement expulsées après leur 
incarcération dans la plaie que les fils de chanvre ou de soie. 
On s’en tint donc à celles-ci , et les partisans de la suture ne font 
pas aujourd’hui difficulté, à l’exemple de M. Delpech, de renfermer 
dans les chairs le nœud qu’elles forment , espérant qu’aucun travail 
d’expulsion ne sera excité par elles, et sachant bien que ce travail, 
toujours tardif , né s’oppose pas à la prompte réunion des surfaces 
saignantes mises en rapport. 

Cependant M. le docteur HoratioG.Jamcson 3 chirurgien de l’hôpital 
<le Baltimore, pense que le but signaléplus haut par les inventeurs des 


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( 47 ) 

ligatures animales peut être sûrement et facilement atteint à l’aide de 
lanières de peau de daim , molles, élastiques , d’une longueur égale au 
double de leur épaisseur. Cps ligatures nouvelles ne doivent pas être 
roulées, mais appliquées à plat, serrées médiocrement sur les extré- 
mités des artères , et coupées ensuite très-près de leur nœud. Selon le 
praticien américain , les lanières dont il s’agit ne divisent pas , lors- 
qu’elles sont ainsi appliquées , les parois interne et moyenne des vais- 
seaux; elles n’étranglent même qu’en partie les vasa vasorum , et ne 
déterminent aucune inflammation suppurative, par cela même qu’étant 
solubles dans un temps convenable , elles sont complètement détruites 
par les vaisseaux absorbans. 

A l’appui d’expériences tentées sur les animaux vivans, M. Jameson 
cite les résultats de sa pratique pendant six à sept années , et plusieurs 
cas d’amputation des membres et du sein après lesquelles il se servit 
avec succès des ligatures de peau de daim ; il assure avoir lié de cette 
manière la carotide une fois , l’iliaque externe deux fois , la radiale 
quatre fois , la tibiale postérieure une fois , la spermatique sept fois, 
sans qu’il ait observé d’hémorrhagie secondaire. Les plaies ont été sou- 
vent alors réunies par première intention , et jamais il n’a rencontré è 
l’autopsie aucune trace des lanières dont il avait fait usage (1 ). On 
conçoit que ces assertions ne sauraient être adoptées avant que les 
résultats sur lesquels elles sont fondées n’aient été vérifiés par d’ulté- 
rieures observations. 

M. le docteur Physick, partant de ce fait que des balles, des frag- 
mens de plomb , des morceaux de fer et d’autres corps du même 
genre sont restés fréquemment durant de longues années au mi- 
lieu des parties vivantes sans occasioner d’accidens , a pensé qu’il en 
pourrait être de même de ligatures composées de fils métalliques. 
Cette idée était demeurée sans application, lorsque M. HenriS. Levert, 
d’Alabama , résolut d’essayer Jes ligatures indiquées par le chirur- 


(i) Observations sur les hémorrhagies traumatiques éclaircies par des expé- 
riences sur des animaux vivans. — Journal des progrès, etc. , vol. 6, y et g. 


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( 48 ) 

gien de Philadelphie. En 1828, M. Lererl s’est livjré à une série d'ex- 
périences , desquelles il résulte que les ligatures des artères au moyen 
de fils de plomb, d’or, d’argent et de platine sont sans danger. Les faits 
suivans ont été constatés par lui : i\ que les bords des plaies dans les- 
quelles ces ligatures étaient incarcérées se sont ordinairement cica- 
trisés sans obstacle ; 2*. que les deux bouts de l’artère liée se sont obli- 
térés dans une étendue de quelques lignes, à l’aide d’une substance 
organisée et fibrineuse ; 3 °. qu’autour du fil se sont formés des kystes 
celluleux qui les renfermaient ; 4°- enfin , qu’il n’y avait pas la moindre 
trace d’inflammation dans les parties environnantes (1). 

Je termine ici cette énumération des résultats fournis par l’emploi 
des ligatures absorbables ou réfractaires à l’absorption, parce que les 
procédés, bien plus que les substances à l’aide desquelles on les pra- 
tique , doivent , d’après le plan que je me suis tracé , fixer mon at- 
tention. J’ajouterai seulement que si l’on peut trouver utile d’enfer- 
mer dans les plaies des liens non susceptibles d’altération, ou du 
moins difficilement altérables , les fils de chanvre devront l’emporter 
sur les fils métalliques, à raison de leur souplesse, de leur ténuité 
et de l’absence d’extrémités toujours aiguës , disposées à blesser 
les parties environnantes , et propres à y développer de l’irritation. 
Sous tous ces rapports, les ligatures ordinaires l’emporteraient donc 
sur celles de métal : l’expérience démontre quelles ne sont pas cons- 
tamment expulsées; et dans ces cas, sans doute, comme dans ceux 
que rapporte M. Levert , leurs nœuds demeurent renfermés et séparés 
des parties voisines à l’aide de kystes qui les protègent et les rendent 
inoffensives. 


(1) Expériences tendant à montrer les effets qui résultent de l'application 
des ligatures métalliques sur les artères. — ; ^Journal des progrès, etc., vol. 17. 


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{ 49 ) 


ARTICLE IV. 

De la torsion des artères. 

Les inconvéniens attachés à là ligature immédiate des vaisseaux, 
telle que l’ont pratiquée , depuis A mbroise Paré, la plupart des chirur- 
giens les plus illustres, ne sont pas sans doute aussi graves qu’oii l’a 
prétendu dans ces derniers temps. Il suffit de suivre les cliniques de 
nos hôpitaux , d’assister à la pratique , et d’observer les résultats des 
opérations qu’on y exécute, pour que l’esprit se rassure et que les 
plus violentes déclamations soient réduites à leur juste valeur. Cepen- 
dant, l’action de lier les vaisseaux n’est pas non plus un procédé telle- 
ment parfait qu’il ne laisse absolument rien à désirer : des ra- 
meaux ou des troncs nerveux ont été compris dans les anses des fils, 
et des accidens sont résultés de cette imperfection , quelquefois diffi- 
cile à éviter. D’une autre part, les fils eux-mêmes, soit qu’on les 
laisse entiers, soit qu’on les coupe très-près des nœuds qu’ils forment, 
constituent dans les plaies des corps étrangers dont la présence excite 
de l’irritation , entrave la réunion des parties , provoque de la phlo- 
gose ; et , dans la presque totalité des cas , ou prolonge la durée du 
traitement des plaies , ou expose les malades à des abcès consécutifs , 
quelquefois étendus et dangereux. 

Ces inconvéniens réels , incontestables , n’ont pas besoin d’être exa- 
gérés pour frapper les praticiens ; ils ont été sentis depuis long-temps, 
et ont excité les recherche^ relatives aux ligatures de matières ani- 
males ou métalliques dont il a été précédemment question. M. Amas- 
sât, frappé surtout de cette présence inévitable de corps étrangers 
dans les plaies , cherchait un moyen d’arrêter les hémorrhagies sans 
qu’il restât, pour ainsi dire, de traces de l’opération, lorsqu’il fut 
conduit par le hasard à tordre les vaisseaux d’où provenait le sang. 
Ses premiers essais réussirent , et il institua , ainsi une méthode hé- 
mostatique nouvelle, que tout annonce comme devant, à raison de son 

7 


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(5e) 

utilité, prendre rang parmi celles qu’on emploie le plus communé- 
ment et avec le plus de succès en- chirurgie. 

Il faut dire ici que le froissement des artères , conseillé déjà dans le 
dernier siècle , d’après ce qui a lieu cher les jeunes animaux , dont le? 
mères coupent, en le contondant , le cordon ombilical, et y arrêtent 
par ce moyen l’hémorrhagie ; que l’absence de tout -écoulement san- 
guin â la Suite dé l’arrachement des membres, des plaies par armes 
à feu , et dans tous- les cas où les tissus et par suite lès vaisseaux ont 
été brisés et déchirés, sont autant de faits qui semblent avoir pu con- 
duire à l’idée de faire lisage de la torsion. M. Thierry. (1) , après b 
communication des travaux- de M. Amussat à la section de chirurgie 
de l’Académie royale de Médecine, a revendiqué la priorité de cette 
application du phénomène bien connu de la rétraction dés tuniques 
artérielle»; mais il s’agit moins dans un travail do la nature de celui-ci 
de discuter des questions de personnes que de décrire les procédés et 
de chercher à apprécier leur valeur. 

Ou peut tordre les artères , soit en les laissant libres et sans limiter 
en aucune manière le mouvement qu’on leur imprime , soit , au con- 
traire, en arrêtant à une certaine hauteur^avec les doigts ou avec des 
pinces , l’action de la torsion , et en l’empêchant de se propager plus 
loin. 

La torsion est libre ou non-, limitée , lorsque après avoir saisi , à la 
surface d’une plaie, l’orifice béant d’une artère, on tord L’extrémité 
do celle-ci un plus ou moins grand nombre de Cois sur elle-même , 
après quoi on l’abandonne à elle-même. G’est au chirurgien à ap- 
précier jusqu’à quel point cette torsion dçit être portée. Six, huit ou 
dix.tours suffisent ordinairement, selon le calibre des vaisseaux. Ce pro- 
cédé , 1 e seul que décrive M. Thierry (2) pour les cas d’hémorrhagie à la 
surface des plaie», présente l’inconvénient d’exposer les parties voisines 
de l’artère, et spécialement les cordons nerveux, qui lui sont unis 


( 1 ) Mémoire sav la torsion des artères. Paris , 1 82g. < 

(a) Ouvrage cité. . 


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( 5 . ) 

par du tissu cellulaire , à être attirés par le mouvement qu’on lui 
imprime , et à participer à sa torsion. En même temps que leur pré- 
sence rendrait celle-ci moins immédiate, et peut-être moins Sûre, 
on conçoit que de vives douleurs et d’autres acoidens graves pour- 
raient être la suite de cette disposition. Dans quelques cas, cepen- 
dant, ce mode de torsion est le seul qu’on puisse mettre en usage, 
comme lorsqu’on agit au fond d’une cavité ou d’une plaie dans les- 
quelles il est impossible d’introduire ou les doigts, ou une seconde 
pince ', en même temps que celle qui sert à saisir le vaisseau. 

La même torsion, sans limites, a été appliquée aux artères intactes 
dans la continuité des membres. Les incisions convenables étant pra- 
tiquées , M. Thierry aproposé de passer, sous le vaisseau mis à décou- 
vert, une aiguille de Deschamps , et de s’en servir comme d’un levier 
pour tordre ses tuniques. Ce procédé, expérimenté sur des chevaux , 
a réussi. Galien l’avait déjà connu et recommandé dans les blessures 
des tubes artériels et veineux (1). Cependant, il serait à craindre que 


(1) Voici, en effet, ce qu’on Ht «tans les oeuvres de cemédecici, lorsqu’il parle 
des remèdes à l’aide desquels on parvient h cicatriser les plaies des artères et 
des veines.: « Erg» qui hase norit , si quandà astilerit ci , oui ex vaincre 
sanguis pro/luit [de his enim primùm agam ) , illicè digitum super os vtd- 
neris vasis importai, Mandé innitens ac sine dolore comprimera ; quippè 
simui tilm sanguinem sislet, tùm eum concrescere in vuinere faciet. Quinimmd 
si vas undè profluitur, a lté rit demissum, cerlius ipsius tùm posilum intel- 
ligat, tàmetiam magnitudinem ; prœlereà vena ne sit an arteria. Post h*c 
lit je cto ti s co attollat , ac modicè iRTOEQUEAT. Quod si ne tune quidem sistitur 
sanguis , si vena fuerit , tentet citra vinculum sanguinem supprimere aiiquo 
ex iis medi’camentis quas sanguinis supprimendi facultatem habeant. Sanè 
opiima [ ho mm sont tmpiastiea ms quas ex friœà resinâ et farinas triticcv 
tenuissimo poiiine » et gypso , aliisque id gtnus sunt confccta. Sin arteria 
sit, duorum alterum , aut vinoulo amplectens , au P totum vas prascidens , 
prafluvium «taies. Sanè vinculum màgnis quoqut venis injicere interdùm 

aogimurj atque etiam , interdùm tolas prœcidere utique transversas 

Tutius tamen est utrumqste faute, at vinculum vasis t raéici injicere, a 


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( *» ) ■ 

les tuniques des artères , allongées par cette torsion comme l’est te 
lien que tord le bâtonnet du garrot, ne perdissent jusqu’à une trop 
grande hauteur leurs connexions y ou ne se déchirassent même dans 
l’épaisseur des parties ; ce qui pourrait donner lieu à des accidens pri- 
mitifs ou consécutifs plus ou moins graves, ainsi que M. Amassai 
s’en est déjà assuré par des essais sur les animaux. 

11 importe donc, dans tous les cas r de s’assurer que la torsion im- 
primée à une artère ne s’étendra pas au-delà des limites qu’on ju- 
gera convenables de lui donner, et que nulle autre partie que les tu- 
niques artérielles elles-mêmes ne participera à ce mouvement, et ne 
s’interposera entre les tours de vrille qu’on leur imprime. Il est 
également important , avant d’exécuter la torsion , de vider la portion 
d'artère sur laquelle on va agir de tout le sang quelle renferme. Sans 
cette précaution, le liquide, à raison de son incompressibilité, ferait 
inévitablement crever le vaisseau sur le côté après les premiers tours. 
Il faut éviter, avec non moins d’attention,, de retenir supérieurement 
l’artère avec des pinces ordinaires à rainures transversales, parce que 
celles-ci, en brisant les membranes qu’elles pressent, pourraient en- 
core faire déchirer le vaisseau. A mesure enfin* qu’on tord une ar- 
tère , il convient de suivre son mouvement fie rétraction ; les tours 
qu’on lui fait faire diminuent sa longueur, et l’on conçoit que si elle 
était maintenue allongée il en résulterait un tiraillement considé- 
rable , et peut-être l’arrachement des portions tordues. 

Je rassemble ici ces préceptes généraux , parce qu’ils sont de ri- 
gueur, et qu’il est impossible d’exécuter méthodiquement, avec sû- 
reté et sans inconvéniens la torsion, si l’on ne s’est au préalable 


quod deinceps haùetur prœcidere. Radicem vasis vooo priorem ejtu partem 
qucB veljecinori propior est vel etiam cordi. » ( Method. med., lib. 5, cap. 3. ) 
On voit dans ce passage que Galien ne regarde pas la torsion comme le moyen 
le plus efficace pour arrêter l’effusion du sang. Il accorde bien plus de confiance 
aux absorbans et à la ligature lorsqu'il s’agit de la blessure d’une veine, ou à 
la ligature de l’origine du vaisseau et & sa section complète , si c’est une artère~ 


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053 ) 

rendu leur observation familière. Passons aux détaili dü procédé 
opératoire. La torsion peut être exécutée avec diverses modifications. 

A. L’extrémité de l’artère étant saisie entre les mords d’uDe pince 
à branches arrondies, et en usant des précautions que j’ai indiquées 
en parlant des ligatures , on doit l’allonger de quelques lignes au- 
devant de la surface de la plaie. Le sang qui la remplit est alors 
refoulé du côté du cœur par la pression du pouce et du doigt indi- 
cateur de la main gauche, avec lesquels on la retient à quelques lignes 
de la pince fixe. On fait exécuter alors, par des mouvemens brusques, à 
cet instrument de six à dix tours au plus sur son axe , puis on 
abandonne le vaisseau à sa rétraction au milieu des chairs. On 
peut , en le pressant fortement entre les doigts , déterminer la rup- 
turedeses deux tuniques internes, et, par suite, faire porter presque 
exclusivement la torsion sur sa tunique celluleuse. Cette rupture est 
d’autant plus assurée que la portion de l’artère comprise entre les 
doigts et la pince est plus courte. 

6. Si , au lieu de six à dix tours complets , on en fait exécuter un 
plus grand nombre à la pince, le bout tordu finit par se rompre. Il 
n’en résulte pas de danger plus grand d’hémorrhagie , et l’on se trouve 
délivré du tourillon celluleux qui, placé au-devant de la partie tordue, 
pourrait peut-être y constituer un corps étranger. 

C. Après avoir provoqué la rupture des deux membranes internes, 
il est possible de rendre la torsion plus solide , soit en roulant en tire- 
bdfcchon la vis que forme la membrane celluleuse , soit en augmen- 
tant le nombre des tours à mesure que , de la base au sommet du 
taisseau, on comprime successivement celui-ci entre les ongles des 
deux doigts qui le retiennent. 

D. La torsion peut encore être portée à- un plus haut degré de so- 
lidité si, après avoir rompu les membranes interne et moyenne de 
l’artère , on refoule en haut leurs extrémités déchirées , en même 
temps que l’on exécute la torsion. Pour cela, le vaisseau étant saisi et 


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( 54 ) 

allongé, -et le sang qu’il contient étant repoussé, le chirurgien 
le- saisit brusquement et le presse .entre ses. ongles pour diviser 
les deux tuniques internes ; ces membranes sont ensuite chassées du 
côté du cœur par la continuation de la pression, et l’on tord ensuite 
jusqu’à là base de leur refoulement , soit en provoquant la chute du 
tourillon, soit sans arriver jusqu’à ce terme. Dans ce dernier cas, il est 
facile de rouler la portion restante en tire-bouchon et de l’enfoncer 
dans les chairs, ou de la tordre plusieurs fois encore, en môme temps 
qu’on la presse de plus en plus près de son extrémité , ainsi que je 
l’ai déjà dit. 

E. Au lieu des doigts , une seconde pince, à branches arrondies, 
peut être employée afin de borner la torsion des membranes arté- 
rielles. Lorsqu’on fait usage de cet instrument , apres avoir allongé le 
vaisseau , préalablement isolé , et avoir refoulé vers le cœur le sang 
qui remplit son extrémité y une légère résistance vaincue , une sorte de 
secousse courte et distincte , indiquent la rupture des deux tuniques 
artérielles sous les mords arrondis qui les pressent. Cette rupture 
étant opérée , la pince doit être maintenue en place , sans qu’il soit 
utile de la trop serrer. On fait agir alors l’autre pince placée au bout 
de l’artère , et on lui imprime le nombre de tours sur son axe , qui 
suffisent pour produire une torsion simple et solide. Si l’on pressait 
trop fortement sur la pince qui a rompu les membranes internes , 
l’artère, trop serrée, se diviserait presque infailliblement en deux 
morceaux au niveau des branches de l’instrument. On peut d’ailleurs 
exécuter avec les pinces toutes les manœuvres indiquées plus haut, 
afin d’augmenter l’eiTet de la torsion , et qui consistent soit à rouler 
l’extrémité de l’artère en tire-bouchon, soit à multiplier les ruptures 
et par suite les spirales, soit enfin à repousser dans les. chairs le bout 
du vaisseau, ou à compléter sa séparation par une multiplicité plus 
grande de révolutions sur son axe. 

F. 11 est également facile , en se servant de pinces au lieu de doigts, 
de refouler vers le cœur les membranes interne et moyenne de l'ar- 


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( 55 ) 

tfcro avant de tonirpi&urderant d’elles la tunique «efluIèase>>Pou«>eelai 
les deux premières uiyant: été rompues à l’aide dit la pince à mords 
arrondis, on, écarte très-légèrement les branches de cet instrument 
et on le maintient immobile, tandis que, la pince fixe , placée à l’ex- 
trémité du vaisseau., est rendueparallèleàTautre et tournée douce- 
mentsur son axe.: parce mouvement l’artère est-allongée , et, comme 
le dit M. J mut sot, passée à la filière; c’est-à-dire que les deux tuniques 
internes étant retenues par la première pince, la membrane cellu- 
leuse obéit seule à la traction, tandis que les autres se trouvent re- 
poussées du icôié du cœur. Cela-fait, on glisse le vaisseau dans la rai- 
uurc de la pince placée le plus près des chairs , pendant qu’on 
imprime à cet instrument un léger mouvement de; rotation vers elles, 
et l’on tord ensuite la tunique celluleuse, avec la pince fixe ap- 
pliquée à l’extrémité de l’artère. 

G. 11 faufrd’a vouer, ces manœuvres sont plus facilement exécutées 
lorsque les doigts limitent la toroion que lorsqu’on se sert de deux ins- 
trumens. La seconde pince n’est utile que pour rompre l’artère et pour 
opérer le refoulement des tuniques vasculaires interne et moyenne. 
Après ce premier temps, le pouce et le doigt indicateur de la main 
gauche saisiront le bout du. vaisseau- au niveau des membranes re- 
foulées -, et l’on fera exécuter une première série de tours à l’instru- 
ment , après quoi les doigts seront portés plus près de la pince qui 
tord, et l’on continuera la torsion pendant un autre instant ; on re- 
prendra enfin plus près encore de la pince , en tordant toujours , et 
ainsi> de suite. L’opération se terminera en roulant en tire-bouchon la 
spirale celluleuse ainsi formée, et en la refoulant avec les doigts dans 
la. profondeur des chairs* , 

S’il s’agissait d’un vaisseau- coupé dans la continuité d'un membre, 
il faudrait opérer, de l’nne des manières indiquées, sur chacune de 
ses extrémités. 

La. torsion avec -rupture et refoulement des membranes artérielles 
interne et moyenne , pratiquée à l’aide des pinces , est celle qui con- 
vient le mieux pour les- troncs principaux des membres : il serait im- 


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.( 56 ) 

possible, avec les doigts seuls , de rompre la tunique moyenne , trop 
épaisse et trop résistante, qui leur sert de base. Je me suis assuré un 
grand nombre de fois , soit en assistant aux expériences de M. A mu- 
tât, soit en opérant moi-mêuae' sur les chiens, que ce procédé suffit 
toujours pour arrêter solidement les hémorrhagies dans les artères 
crurales, carotides, iliaques et même dans le tronc aortique : l’obstacle 
opposé par la torsion à la sortie du sang est alors si efficace , qu’on 
peut immédiatement après l’opération isoler complètement le bout 
tordu des tissus adjacens; ce bout se redresse, et offre des pul- 
sations distinctes à la vue ainsi qu’au toucher, mais aucune effusion 
sanguine ne s’opère par son extrémité. 

Il résulte des expériences tentées jusqu’ici , que la torsion simple 
et sans refoulement préalable des tuniques interne et moyenne ne 
suffirait que pour les artérioles du troisième ordre; que le refoule- 
ment opéré avec les doigts est assez solide pour arrêter l’effort du sang 
dans les artères du second ordre; enfin , que les artères du premier 
ordre exigent une rupture plus parfaite et un refoulement porté plus 
loin, qu’on ne peut obtenir autrement qu’à l’aide des pinces. 

Les artères libres et isolées qui se distribuent dans les grandes 
cavités splanchniques ne sont pas soumises avec moins de sûreté 
à la torsion que celles des membres. M. À mimât et moi, vou- 
lant constater si l’absence de tissu cellulaire abondant et de parties 
charnues ou fibreuses résistantes pouvait exercer quelque influence 
défavorable sur le succès de l’opération , avons ouvert la cavité abdo- 
minale et tordu, selon les procédés indiqués plus haut, non-seule- 
ment les artères mésentériques et épiploïques, sur lesquelles M. Thierry 
avait déjà agi, mais encore les rénales et les spléniques. Plusieurs 
chiens ont été soumis à ces essais j et jamais la moindre hémorrhagie 
ne s’est faite dans la cavité abdominale.. Çes expériences démontrent 
que dans les blessures du ventre avec ouverture de quelques-uns des 
vaisseaux de l’intérieur de cette cavité, il serait préférable , si la source 
de l’hémorrhagie était à la portée des instrumens , de recourir à la 
torsion plutôt qu’à la ligature. Celle-ci alors fait plus que nuire à la 
réunion de là plaie: les fils qui servent à la former deviennent trop 


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( 5 7 ) 

souvent, par leur présence, là cause de péritonites graves ou même 
mortelles. .... 

M. Regnier , vétérinaire des gardes-du-corps du Roi , compagnie de 
Noailles , a employé la torsion avec succès pour arrêter l’hémorrhagie 
qui succède à l’ablation de la queue chez le cheval. Ce praticien n’a 
fait usage que de la torsion libre :’celle qui est limitée avec les doigtB 
ou avec la pince aurait sans doute mieux réussi encore, car il parle 
de suinteniens sanguins qui ont quelquefois suivi l’opération , et qui 
n’ont jamais lieu lorsque l’artère, d’abord isolée convenablement, 
a été saisie ensuite transversalement , et pressée jusqu’à la rupture 
de ses membranes interne et moyenne , avant que sa tunique 
celluleuse fut tordue. Au surplus, M. Regnier a reconnu que ce 
procédé hémostatique réussit aussi sûrement que la cautérisation , 
et qu’il présente l’avantage de causer moins de douleur au cheval , 
dont la plaie guérit d’ailleurs avec plus de promptitude et de faci- 
lité (i). 

Les observations de M. Regnier furent répétées , au mois d’août 
1829, par M. Dard, médecin vétérinaire à Paris. Ce praticien a tordu, 
sur des chevaux , l’artère tibiale postérieure , les artères latérales du 
canon, celles de la queue , et jusqu’aux carotides. Dans un cas, une 
des artères coccygiennes continua à fournir du sang, et il fallut la cau- 
tériser ; dans un autre , une des carotides ne put non plus être tordue 
assez complètement pour arrêter l’hémorrhagie , et il fallut la lier; 
mais sur les sujets des autres observations , la torsion a parfaitement 
réussi (a). R serait possible que M. Dard ne fût pas alors assez fami- 
liarisé avec ce mode opératoire pour l’exécuter parfaitement, et pour 
en obtenir tous les avantages qu’en ont retiré MM. Amustat et Thierry. 
Les observations de ce médecin ne peuvent cependant qu’encourager 
les vétérinaires dans la pratique de la torsion. C’est én essayant ainsi 


( 1) Journal de médecine vétérinaire, par 31 . Dupuis, Juillet , 1829. p. 36 a. 

(a) Recueil de médecine vétérinaire, par 11 . Girarâ. Septembre, 1839, 

5oj. • " r ‘ ■ ' ;x '• 

8 


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( 58 ) 

les méthodes chirurgicales nouvelles, et en comparant leurs résultats 
avec ceux des procédés anciens , que les chirurgiens vétérinaires con- 
tribueront le pl us aqx ,pr,ogrès. généraux de la médeciue générale, dont 
l’art qu’ils cultivent est une des divisions. . 

Les effets immédiats de /extorsion présentent des particularités remar- 
quables. Après l’exécution de cette opération solon le dernier des pro- 
cédés décrits plus haut, que je prend pour type, on trouve que les 
parties ont , acquis le^ dispositions suivantes : 

i°. Les tuniques interne et moyenne de l’artère sont rompue» 
comme après la ligature , et forment de plus, dans l’intérieur du vais- 
seau , un bourrelet qu’on ne peut mieux comparer qu’à une valvule 
circulaire rçployée. et ouverte du côté du cœur. . 

2°. A l’extérieur, la tunique celluleuse est contournée sur elle- 
même , etçoiffe à la mauière d’un capuchon le moignon que présente 
l’artère. .. 

Chacune de ces dispositions , le refoulement valvulaire des tuniques 
interne et moyenne du vaisseau , et la torsion de la membrane cellu- 
leuse, produite .isolément , suffit, en beaucoup de cas, pour arrêter 
les hémorrhagies artérielles , d’où il résulte que l’on ne saurait douter 
de leur efficacité, lorsqu’elles existent simultanément et se fortifient 
l’une par l’autre. 

Arrêté par l’obstacle insurmontable qu’il rencontre à l’extrémité du 
vaisseau, le sang y forme un caillot, qui éprouve successivement les 
transformations que nous avons décrites à l’oçcasjon de la cessation 
spontanée des hémorrhagie». Ce caillot, toutefois, est ordinairement 
composé de deux parties, l’une renfermée dans la tunique celluleuse 
au-dessops du refoulement l’autre contenue dans le canal même de 
l’artère, au-dessus, du premier*. Le pertuis étroit que le refoulement 
laisse libre à son centre sert de communication de l’une A Taqtre , et 
par les accroissemens successifs qu’il reçoit, celui qui occupe la ca- 
vité de l’artère s’étend bientôt jusqu’à la naissance de la branche col- 
latérale la plus rapproché^ du lieu de l'opération. Lorsque ïe refoule- 
ment a été porté assez loin, et que le bourrelet interne est assez saillant 


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( 5 9 ) 

pour s’appliquer partout à lui-même et oblitérer exactement l’ouver- 
ture du vaisseau , il n’y a qu’un seul caillot, celui qui est intérieur, 
et la 'membrane celluleuse, tordue sur elle-même, est appliquée sans 
intermédiaire contre le repli formé par les autres tuniques: 

Quelque importance que l’on pût reconnaître aux faits et aux con- 
sidérations précédemment exposés, et quelle que fût la confiance 
que l’on se sentit porté à accéder aux expériences exécutées sur 
les animaux vivans, il restait cependant encore à déterminer si la 
torsion est applicable aux artères de l’homme. L’organisation du 
chien et même celle du cheval diffèrent trop de celle des êtres de notre 
espèce, pour que ce doute ne se présentât pas d’abord â l’esprit et ne 
dût, avant tout , être levé. M. Amussat expérimenta d’abord sur les 
cadavres : il tordit successivement, après la mort, comme il l’aurait 
fait sur le vivant, des artères de diverses grosseurs; puis simulant, à 
l’aide d’une seringue appliquée à une certaine distance du lieu de l’o- 
pération, l’action du cœur, il examina avec attention les phénomènes 
qui se manifestèrent. L’eau injectée fut toujours exactement conte- 
nue. Après avoir distendu l’artère avec une force proportionnée à 
l’intensité de la pression exercée sur le piston de l’instrument, le li- 
quide allongeait le bout du vaisseau par saccades lorsqu’on lui im- 
primait des secousses analogues à celles du pouls ; dans le cas de pres- 
sion continue, l’allongement se faisait par gradation , mais la torsion 
résista, quelle que fût la force qu’on mît en usage. 

Cependant il arrive quelquefois, sous l’influence d’efforts exces- 
sifs et réitérés, que l’eau refoule les membranes interne et moyenne, 
après avoir passé à travers l’ouverture de leur bourrelet , et que , 
sans s’échapper au-dehors, elle remonte sous la membrane celluleuse, 
qu’elle détache des autres jusqu’à une hauteur plus ou moins consi- 
dérable. 

Les applications de. la torsion à l'homme vivant ne pouvaient plus , 
après tant de précautions, d’essais et d’études, être accusées de té- 
mérité , ou considérées comme de hasardeuses expérimentations. 


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( 6o ) 

M. Amussat employa ce procédé dans trois cas ., dont je vais rendre- 
compte. 

Le premier est celui d’uue amputation de la jambe, qui fut faite 
pur un serrurier dont le pied avait été complètement écrasé, dans une 
chute de soixante-dix pieds de hauteur, par l’axe d’un tour qu’il en- 
traîna avec lui et qui pesait soixante livres. Les plus petites artères 
du moignon furent d’abord tordues ; mais M. Amussat, n’ayant pas 
encore une confiance entière dans la torsion, cédaàde justes craintes, 
et jugea prudent de terminer l’opération par la ligature des troncs 
principaux : la guérison eut lieu ensuite sans accident. 

Le second cas a pour sujet un jeune polonais à qui M. Amussat 
extirpa le testicule : la torsion fut faite sur sept artères, tant du scro- 
tum que du cordon spermatique; une hémorrhagie peu considé- 
rable eut lieu toutefois par le cordon , et l’on ne put distinguer si le 
sang provenait d’une artère imparfaitement tordue ou d’une branche 
qui n’aurait pas été d’abord aperçue. 

Dans le troisième cas, il s’agit d’une amputation de la cuisse, faite 
sur une femme, à la suite d’une fracture de la jambe , compliquée de 
plaie et suivie de la gangrène de cette partie. L’étendue de la mortifi- 
cation , la présence des gaz dans le tissu cellulaire sou&-cutané , l’état 
de prostration des forces de la malade, étaient des circonstances trop 
graves pour qu’on pût considérer l’opération autrement que comme 
une ressource dernière et incertaine. L’artère crurale fut tordue; 
mais la malade succomba trente-six heures après l’amputation. L’ar- 
tère ayant été séparée du corps, fut présentée à l’Académie royale de 
Médecine , et chacun put s’assurer que le tourillon de la membrane 
celluleuse y existait encore; il soutenait un caillot conoïde absolument 
identique avec celui qu’on observe, en pareille circonstance, sur les 
animaux vivans. 

Bien que ces observations laissent beaucoup à désirer, elles suffisent 
cependant pour faire sentir lés Avantages de là torsion , et pour en- 
courager à 1 employer, à la suite dés opérations ou des blessures dans 
lesquelles les plus gros vaiSseaüx sont: intéressés.' ’ 


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( 6 . ) 

Depuis la publication des expériences de M. Amussat sur les ani- 
maux, et des tentatives sur l’homme vivant dont nous venons de rendre 
compte, quelques chirurgiens ont cherché, dans l’observation des faits, 
à estimer à sa juste valeur une innovation chirurgicale qu’ils croyaient 
heureuse. 

Al. le docteur Blandin , après avoir amputé, à la manière ordinaire, 
le sein gauche, atteint de cancer, sur une femme d’environ quarante- 
cinq ans , vit le sang s’échapper en grande quantité par une artère 
située à l'angle supérieur et externe de la plaie. L’extrémité de ce 
vaisseau fut saisie avec une pince, et tordue quatre fois sur elle-même, 
puis abandonnée; l’hémorrhagie s’arrêta aussitôt, et la plaie put être 
réunie de la manière la plus exacte à l’aide de bandelettes agglutina- 
tives. L’artère ainsi tordue avait à peu près le volume d’une petite 
plume de corbeau ; les pinces dont on fit usage pour la saisir et la 
tordre étaient de celles qu’emploient les horlogers , dont les mords 
se terminent carrément par des surfaces planes , qui se correspondent 
dans une grande étendue , et qui sont un peu marquées de stries 
transversales. Ces inégalités les rendent plus prenante s, c’est-à-dire 
qu’elles permettent de retenir avec plus de force les corps qu’on saisit 
avec leurs extrémités (i). 

A l’hôpital Saint-Antoine, AL Velpeau , après l’amputation de la 
cuisse, pratiquée le 21 septembre 1829, sur une jeune fille de dix- 
neuf ans, tordit l’artère crurale et une petite branche qui donnait du 
sang, trois fois complètement sur leur axe. Les parties furent ensuite 
immédiatement réunies au moyen de bandelettes des pièces d’ama- 
dou, des compresses, de la charpie et une bande roulée complétè- 
rent le pansement. Les résultats immédiats et locaux de l’opération 
furent satiBfaisans. Aucune hémorrhagie n’eut lieu ; mais la malade 
succomba , douze jours environ après l’amputation , à des compli- 
cations accidentelles. 

Encouragé par ce début, M. Velpeau , ayant amputé à lambeaux le 


( 1 ) Journal hebdomadaire de médecine > t. 4» P* a,a - 


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( 6a ) 

bras d’un jeune homme de ving- trois ans , saisit avec dés pinces fixes 
l’extrémité de l’artère humérale , l’attira au-dehors , l’isola et la tordit 
trois fois sur elle-même ; il l’abandonna ensuite à sa rétraction. La 
grande collatérale fut tordue selon le même procédé. La torsion des 
artérioles a été moins heureuse ; on l’a réitérée trois fois inutilement 
sur un rameau de la grande musculaire, qu’il a fallu lier. Du sang s’é- 
chappait en nappe d’un autre rameau ; mais M. Velpeau a passé outre 
et procédé à la réunion immédiate des parois de la plaie. 

Quelques instans après le pansement, et alors qu’on terminait 
l’examen de l’avant-bras malade , une hémorrhagie apparut. Le tour- 
niquet , qu’on avait placé par précaution , fut serré , l’appareil fut 
imbibé d’eau fraîche; mais, ces moyens ne suffisant pas, il fallut re- 
nouveler le pansement et l’appareil. Le sang provenait de plusieurs 
artérioles qui avaient échappé â la torsion, et peut-être aussi de celles 
BUr lesquelles on l’avait pratiquée. Le tronc principal ne donnait pas ; 
maisM. Velpeau, après avoir lié les autres vaisseaux, crut aussi devoir 
jetersur lui une ligature, afin de prévenir de plus graves accidens (i). 

’ 11 convient d’abandonner ces faits à la méditation des praticiens ; 
eux seuls peuvent être actuellement saisis de la question , et possèdent 
les moyens de la résoudre en dernier ressort.- La théorie et les vivisec- 
tions ont fourni tout ce qu’on en pouvait attendre y c’est maintenant 
à l’ëxpérience clinique à mettre son poids dans la balance et â pro- 
noncer le jugement. 

■> 'Sans prétendre pénétrer à t’avance quelle sera sa décision, cher- 
chons cependant à développer les raisons sur lesquelles on pourrait 
s'appuyer, dès à présent, pour procédera des applications plus har- 
dies delà méthode hémostatique qui nous occupe. 

' 'Faisons' observer , i*. que la torsion des artères est applicable dans 
tous leé cas où lés ligatures peuvent être pratiquées, et même dans 
quelques-uns de ceux qui se refusent à leur emploi; s*, que ce moyen 
est^aussi 'prompt ‘que l’action de lier les Vaisseaux ; 3*. qu’il est moins 

t A 

( i ) Lancette française , t. a , numéros 4a , 46 et 48. 


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( «3 ) 

douloureux que la ligature, telle qu’on la pratique ordinairement; 
4*. que la totsion est plus simple et plus facile que la ligature , puis- 
que pour celle-ci il faut être deux, tandis que seul on peut exécu- 
ter celles-là ; 5\ qu’àprès la torsion aucun Corps étranger ne s’oppose, 
comme cela à lieu à la suite de la ligature , à la réunion parfaite de 
toute la surface des plaies. 

Jusqu’ici tout est à l’avantage de la torsion. 11 reste à déterminer 
maintenant , î*. si les caillots qui succèdent à son emploi sont aussi 
solides, aussi peu susceptibles detre dérangés ou chassés par i’efFort 
du sangqu’après la ligature; 2 °. si par la torsion on arrête aussi sûr 
rement , dans la, grande majorité des cas , les hémorrhagies que par 
l’application des fils cirés, c’est en cela que consiste toute la difficulté. 

On a opposé à la torsion les objection» suivantes : 

Première objection. On conçoit très-bien, à-t-on dit, la possibilité de 
faire saillir les artères volumineuses, de manière à ce qu’elles puissent 
être tordues; mais cette possibilité n’existe pas à un égal degré pour 
les artères du second et du troisième ordre. 

Seconde objection. L’hémorrhagie consécutive n’est pas aussi sûre- 
ment prévenue par la torsion que par la ligature.; car l’impulsion du 
« an g peut détordre les membranes artérielles tournées en vrille avant 
que le caillot ait acquis une solidité suffisante pour ne pas être chassé 
hors du vaisseau ; ou bien il est à Craindre que. le sang, en sortant de 
l’orifice formé par les deux membranes interne et moyenne, ne s’in- 
filtre dans la tunique celluleuse, et ne la détache . à une hauteur con- 
sidérable. 

11 est facile de détruire ces craintes. 

Et d’abord, nous pouvons assurer qu’à F aide des précautions indi-, 
quées précédemment, il est toujours aussi facile de saisir et d’isoler 
les petites artères que les plus; volumineuses» U us Vagit .que, d’avoir 
acquis L'habitude de les distinguer , et de, Vêtre suffisamment fomiliar 
risé avec le procédé opératoire. • ;i. • 

Les craintes, relatives à la détorsion «ont-elles mieux fondées? La, 


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( 64 ) 

pression des tissus environnans sur l’extrémité rétractée du vaisseau 
devra s’opposer à cette détorsion. 11 n’est pas exacte de dire , avec 
M. Hedelhoffer , que la force avec laquelle le sang vient frapper le 
bout de l’artèretordue tend à rapprocher les pas delà vis qu’il forme, 
et à augmenter la résistance qu’elle oppose à l'hémorrhagie : cela ne 
saurait avoir lieu qu’autant que l’extrémité du tourillon serait fixée, ce 
qui n’existe pas dans le cas présent. Mais on peut croire que l’impul- 
sion du liquide chassé par le cœur , en agissant sur la surface inclinée 
de l’origine de la vis, sera décomposée et n’aura pas assez de force 
pour la détordre , au moins jusqu’à ce que le caillot soit devenu so- 
lide : c’est ce que démontrent d’ailleurs les expériences sur les ani- 
maux vivans, et ce que M. Thierry à fort bien remarqué. 

Sous le rapport de l’anévrysme faux consécutif dans latuniquccellu- 
leuse, nous n’en avons jamais vu survenir. Une seule fois nous crûmes, 
M.Amtmat et moi , trouver quelque chose de semblable sur un chien 
dont on avait,' un mois auparavant, tordu la crurale ; mais un exa- 
men attentif nous fit voir que la distension de la tunique celluleuse 
était due à un développement fongueux et non à un caillot sanguin. 

Si le bout de l’artère à tordre était trop voisin de la naissance d’une 
collatérale volumineuse pour qu’un caillot solide s’organisât au-des- 
sus du lieu de l’opératiou , une hémorrhagie consécutive serait sans 
doute à craindre; mais on sait qu’alors la ligature elle-même est, à 
sa chute , suivie d’un accident semblable qui dépend également de la 
même cause. Les deux méthodes sont donc , dans cette circonstance, 
parfaitement semblables et également accompagnées de chances d’in- 
succès. 

Quel que soit d’ailleurs le sort définitif que la torsion éprouve comme 
méthode générale! hémostatique, on ne pourra contester qu’elle n’ait 
augmenté la puissance de l’art contre un accident redoutable, et fourni 
le] moyen de rendre de grands services à l’humanité. A l’aide dece pro- 
cédé, ou des modifications qui en dérivent, on pourra sauver la vie à des 
sujets qui , sans ce moyen , seraient condamnés à une mort à peu près 
certaine. Qu’un homme, pat exemple, ait un gros vaisseau, comme la ca- 


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( 65 ) 

rotide, l’axillaire , la crurale, ouvert près du tronc, et qu’un chirur- 
gien seul se trouve près de lui, ce chirurgien pourra, quoique 
sans aide, et presque sans ihstrumqpt, porter ‘au Blessé des se- 
cours efficaces. Lès pinces , guidées par lé doigt, serviront à saisir 
l’artère, à l’isoler, à la tordre. t.e praticien èst- il dépourvu de cet 
instrument, il pourra encore, tandis qu’un dë ses doigts comprime 
le vaisseaü, Isoler celui-ci avec cë qui peu t se trouver Sous sa main, 
comme un canif, une aiguille, etc; et 1 , passant à travers les parois 
‘artérielles une forte épingle, s’en servir comme d’un garrot pour 
les tordre.’Âvec du sang froid on parviendrait presque toujours sû- 
rement à sé rendre ‘fnàîtrè alors dé l’hémorrhagié , et à l’airrêter, 
sinon d’ùne maniéré définitive, du nioins jusqu’à ce ‘que dés se- 
cours plus méthodiques puissent être prodigués au blessél Combien 
de semblables ressources ne peuvent-elles pas devenir précieuses dans 
l’isolement des campagnes ou au milieu- des pénuriesde la guerre! 

Dans les occasions de ce genre, il ne s’agit pas de chercher le pro- 
cédé le plus sûr, mais d’employer le seul qu’on ait à sa disposition; 
et l'on ne saurait disconvenir que lorsque la ligature est impossible à 
pratiquer , posséder la torsion c’est avoir une arme puissante à oppo- 
ser à l’effusion du sang. 

Mais dans l’exercice régulier et paisible «le l’art, d’autres considé- 
rations doivent diriger le chirurgien: il y aurait plus, peut-être, 
que de la témérité à lui de quitter ou de négliger brusquement un 
moyen hémostatique sanctionné par l’expérience, pour recourir à un 
procédé nouveau , de quelques probabilités rassurantes qu’il soit en- 
touré, dans des cas où la vie des sujets peut se trouver si aisément 
compromise. 11 faudra donc , après avoir expérimenté souvent la 
torsion sur les animaux , afin de se la rendre familière , essayer d’a- 
bord son usage dans les opérations où de petites artères sont seules 
interressées , comme après les ablations de tumeurs squirrheuses, 
après la castration , etc. Ce n’est qu’après avoir réussi à diverses re- 
prises, et avoir des gages assurés de sécurité, que l’on pourra passer 
graduellement à l’emploi du môme moyen, sur des artères plus consi- 

9 


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( 66 ) 

d érables, dont les hémorrhagies seraient plus dangereuses. Je me plais 
è citer ici les paroles de M. le docteur Blandin , parce qu'elles expri- 
ment les principes de prudence auxquels le chirurgien doit alors obéir, 
ceux dont je me suis promis depuis long-temps de ue pas m’écarter : 
« Sans rien préjuger, dit-il, sur la valeur de la torsion appliquée aux 
grosses artères chez l’homme, nous croyons que la prudence exige 
que, de prime-abord, on n’en use pas dans les cas de grandes amputa- 
tions des membres , mais que l’on en borne l’emploi à des artères de 
médiocre calibre. Le succès , dans ces cas , doit seul autoriser à suivre 
une conduite de plus en plus hardie , jusqu’au moment où un juge- 
ment définitif aura été porté sur la torsion , et où ce moyen sera tombé 
tout à fait dans le domaine de la science. Yoilà la règle de conduite 
que nous nous sommes tracée , et de laquelle nous ne dévierons ja- 
mais (1). > 

(i) Journal hebdomadaire de médecine, t. 4» P- *>o. 


FIN. 


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(67 ) 


H1PP0CRATIS A P H O fi 1 S M 1 

( et lente Pariset). 

I. 

Solvere apoplexiam , vehementem quidem , impossibile : debilem 
▼erô, non facile. Sect a , aph. [\%. 


II. 

Vulneri convulsio superveniens , lethale. Sect. 5 , aph. a. 

III. 


A. tabe detento , alvi profluvium superveniens , lethale. Ibid. ,■ 
aph. 14. 


iy. 


Ophthalmiâ laborantem , alvi profluvio corripi , bonum. Sect. 6 , 
aph. 1 7. 


V, 


Erisipdas foris quidem introverti , non bonum ; intûs verA foras , 
bonum. Ibid. , aph. a 5 . 

VI. 


A pleuritide peripneumonia , malum. Sect. y, aph. 11. 

i 

* 

/ 


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EXPLICATION DES PLANCHES. 

PLANCHE PREMIÈRE. 


Cette planche représente la vésicule biliaire d’un chien , aveo la portion du 
foie à laquelle elle est unie. 

a. Point où la vésicule a été piquée et cautérisée. 

é , 6. Bords de la scissure du foie où la vésicule était logée, et qui la recou- 
vraient entièrement à la suite de l'opéràtion. On lés a écartés pour examiner 
l'état de la piqûre. 

c. Petite escliarre noire qui a été détachée de la plaie a, et qui est restée 
adhérente à la partie du foie qui lui correspondait. 

PLANCHE DEUXIÈME. 

Fig. i et a. Branches de l’instrument vues isolément et par leur face interne. 

a, a (Fig. i ). Entailles destinées à recevoir les deux monta ns 6 , b 
(Fig. a), dont on voit l'élévation et la disposition dans la Fig. 3. 
coupe suivant AB/ 

Fig. 4* L'instrument vu sur une de ses faces, c. Bistouri tçoaculum, mo- 
V bité à son point d’iinion avec la pince sur laquelle il se ferme. 
d . Plaque mobile, fenêtrée et surmontée d'un épaulement d', allongé 
transversalement, e, e. Fis qui servent à la fixer, et lui permettent 
de se mouvoir suivant sa longueur. Cette plaque est taillée en biseau 
sur seç côtés , et arrondie à son ,çxfr^it£ t aptérêure pour s'engager 
dans les rainures à queue d’aronde des moptane 6, b , lesquel*, lors- 
que les branches sont en contact , dépassent l'épaisseur de la branche 
entaillée. 

Fig. 5. La pince vue sur son aut^e face. f\ Plaque destinée 4 augmenter 
l'épaisseur de la pince pour la rendre plus facile à tourner entre les 
doigts. 

Fig. 6. L'instrument vu de profil, g, g. Rainures qui n’existent que sur le 
dos des branches, immédiatement au-dessous des dentelures. 


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